L'Algérie ne remettra pas en question son programme de développement socioéconomique en dépit de la crise du marché pétrolier. Pas plus qu'elle ne touchera à la subvention des produits de première nécessité. Il s'agira, en revanche de s'appliquer à rationaliser les dépenses publiques. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, lors de sa prestation télévisée, s'est employé à rassurer les Algériens sur les conséquences de la baisse des prix du pétrole dont la remontée pour atteindre les 120 dollars est quasiment écartée comme hypothèse de travail, de la bouche même du Premier ministre. Celui-ci fonde son optimisme sur les atouts de notre pays : un désendettement qui l'a affranchi des injonctions des instances financières internationales et la constitution d'un matelas de réserves de change qui la sécurise pour 3 à 4 ans au cours desquels, l'Algérie peut continuer à importer pour répondre aux besoins de la population et de son développement. Les projets d'investissement, surtout ayant une dimension sociale comme l'habitat, la santé, la formation, l'enseignement et l'emploi seront donc maintenus. D'autres, dont l'urgence n'est pas avérée, comme le tramway et le rail, peuvent seulement être retardés dans certaines régions mais ne seront pas annulés. En revanche, Sellal, qui a récusé la notion de politique d'austérité, a insisté sur l'impératif stratégique de réduire les dépenses publiques superflues. Il s'agira d'agir sur le levier du dossier de l'importation dont la facture ne cesse de croître. La Banque d'Algérie a recensé quelques 42.000 dossiers suspectés de fraude. Le rétablissement de la license d'importation est de nature à mettre de l'ordre dans le secteur, à séparer le bon grain de l'ivraie, selon l'invité de la Télévision, qui a exprimé sa surprise devant l'augmentation exponentielle de la facture d'importation des médicaments. Pour faire face à la baisse des ressources induite par la dépréciation du baril de pétrole, le gouvernement compte réorienter le financement de certains projets vers les entreprises qui recourront à la banque, afin de soulager le Trésor public, lequel n'aura pas à supporter indéfiniment le poids des crédits pour de gigantesques projets. La nouvelle aérogare en construction de l'aéroport Houari-Boumediene et le port de Ténès, appelé à supplanter celui d'Alger, auront à user de ce mécanisme. Mais au-delà de ces réajustements budgétaires pour trouver le bon équilibre entre les ressources et les dépenses, le challenge est de libérer l'économie nationale de la dépendance accrue aux hydrocarbures dont le caractère aléatoire des cours a déjà infligé à l'Algérie une épreuve difficile en 1986. Dans cette perspective, les réformes en cours de mise en œuvre dans le tissu productif destinées à faciliter l'acte d'investir doivent tendre vers cet objectif fondamental. Le Premier ministre parlera de quelques secteurs devant être privilégiés dans le plan d'action du gouvernement pour les cinq années à venir : l'agriculture, qui devra couvrir les besoins des algériens dans une proportion de 75 à 80% à la fin du programme quinquennal, l'industrie, qui a déjà amorcé sa restructuration, le tourisme et la technologie numérique. Par ricochet, Sellal a souhaité que la crise du marché mondial des hydrocarbures serve de déclic pour lancer la croissance en dehors des ressources énergétiques. La sortie télévisée du Premier ministre ne pouvait pas faire l'impasse sur la problématique du gaz de schiste qui suscite des inquiétudes dans les régions concernées du sud. Là aussi, Sellal rassure les populations de ces régions : ce ne sont que des études qui sont entamées et il n'y a, selon lui, aucun souci à se faire sur la nappe phréatique. Il rappellera la loi adoptée en ce sens en avril 2013 qui prévoit de revenir en Conseil des ministres pour avaliser une éventuelle exploitation des énergies non conventionnelles dont l'Algérie détiendrait, selon des études, la troisième réserve mondiale. Ceci prépare aussi l'après-pétrole dont le tarissement se situe à l'horizon 2037. Un manque de communication semble avoir alimenté le mécontentement qu'il y a lieu de dédramatiser.