Que pensent les experts de l'exploration et de l'exploitation du gaz de schiste ? Professeur de thermodynamique à l'Ecole nationale polytechnique d'Alger, Chemseddine Chitour, a affirmé que les études d'exploration lancées par Sonatrach du gaz de schiste doivent se poursuivre pour permettre d'évaluer les réserves réelles de cette énergie non conventionnelle. Dans une déclaration à l'APS, l'expert regrette que la seule estimation faite dans ce sens provienne d'une étude américaine. Il considère que le gaz de schiste est une richesse à exploiter rationnellement et que les forages d'exploration sont nécessaires pour maîtriser la technique, rassurant que leur faible nombre « n'hypothéquera » pas les fondamentaux de la vie au Sahara. Il a estimé que ce gaz ne fera partie du mix énergétique national qu'une fois la technologie de production sera mature. Chitour estime aussi que le gaz de schiste aurait toute sa place dans le cadre d'une stratégie énergétique à long terme, basée avant tout sur la sobriété énergétique. « Prématuré de parler de moratoire » Idem pour l'expert Abdelmadjid Attar, qui a indiqué que cette ressource énergétique doit avoir sa place à long terme comme une ressource complémentaire dans le mix énergétique national et ne doit, en aucun cas, « être considérée comme une rente ». Il estime que l'opération d'exploration est une « phase obligatoire » avant d'envisager toute exploitation, laquelle exige une autorisation du Conseil des ministres conformément à l'article 23 bis de la loi sur les hydrocarbures. Il dira que des pays comme la Chine, l'Argentine, le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Afrique du Sud et même l'Arabie saoudite sont aussi en phase exploratoire de leur gaz de schiste. Il a souligné que le gouvernement fait face à un « grand défi » qui est celui de mettre en place un modèle de consommation énergétique comprenant en priorité l'investissement dans le renouvelable, l'impulsion d'un programme d'économie d'énergie et la préservation d'une rente minimale pour financer une nouvelle économie productrice de richesses. Interrogé sur l'impact environnemental de l'exploitation du schiste, Attar a tenu à préciser que les risques enregistrés en début d'exploitation aux Etats-Unis et en Pologne sont « dus à l'absence de mesures de prévention et à un contexte géologique, hydrogéologique ou topographique qui n'existe absolument pas en Algérie ». La perception des risques attribués à l'exploitation du gaz de schiste est « souvent excessive », alors que l'industrie pétrolière dispose de moyens lui permettant de maîtriser ces risques pour peu que les mesures adéquates soient prises, a affirmé, pour sa part, l'expert pétrolier Francis Perrin. Il explique que les risques de polluer les nappes phréatiques relèvent plutôt du non-respect des normes assurant l'intégrité des forages. Perrin rappelle, à ce titre, que la fracturation hydraulique, qui suscite des appréhensions, « est utilisée depuis plusieurs décennies par les compagnies pétrolières sans, pour autant, provoquer des controverses jusqu'à ce que l'on parle tout récemment des gaz de schiste ». Interrogé sur la rentabilité de l'exploitation coûteuse du schiste dans un contexte baissier des prix du gaz, Perrin explique que seuls les forages d'exploration permettent d'affiner les évaluations en termes de coût. Abordant les chances pour l'Algérie de trouver des débouchés pour son gaz de schiste si elle venait à l'exploiter, Perrin dira que le pays « a les moyens d'affronter une concurrence vive avec l'émergence de nouveaux pays producteurs et exportateurs de gaz ».