« C'est le parc qui fut le premier à être classé, dès août 1923 », dit, avec un brin de fierté, Mesloub Abdelkader, un des cinq ingénieurs agronomes qui travaillent à la maison du parc inaugurée en 2007. Cet espace est doté d'une médiathèque, d'une salle d'exposition, d'un coin enfants et de laboratoires, mais peine encore à fonctionner, faute de personnel. Il s'élève en bordure du royaume du cèdre où le pic le plus élevé, Brarit, culmine à 1.787 m. Cela pourrait être le point de départ d'une exploration et d'un circuit auxquels songent les responsables. En face, des familles affluent chaque jour dans un espace de détente où broutent quelques poneys et où des enfants s'adonnent à des jeux. Un peu plus haut, la route goudronnée et les pistes qui la prolongent sont un terrain de rêve pour les randonneurs et les sportifs. A la condition de renforcer la sécurité, qui n'est pas tant liée au terrorisme qu'à des comportements de petits voyous, l'aménagement prévu, d'une dizaine de clairières, pour les campings ou les pique-niques, attirera davantage de visiteurs. Le décor de cèdres et de chênes du parc, d'une superficie de 3.616 ha, revêtus de neige, très abondante dans la région, est celui d'une carte postale. Une station de ski, sport favori des colons, a été abandonnée. Les lieux demeurent, pourtant, quelque peu méconnus. Beaucoup moins que Tikjda, Chréa ou Tala Guillef où les surfaces de cet arbre qu'est le cèdre sont plus importantes mais moins préservées. A quelque chose malheur est bon, l'isolement et l'absence d'hôtels ont favorisé la protection de la biodiversité d'une richesse exceptionnelle en matière de faune et de flore. Du gypaète barbu, de l'aigle royal au triton d'Afrique du Nord, du porc épic au hérisson à diverses plantes comme les chêne-zen et liège, l'eucalyptus ou le cyprès, le parc renferme 1.037 espèces animales et vegétales. La rainette verte, minuscule grenouille, sautille dans les fourrées. Des lâchers de faisans ont été organisés, mais nulle trace de singes. La surfréquentation a des effets nocifs sur le développement des végétaux. « Voilà ce que je crains le plus », nous confie un technicien familier des rencontres avec les nombreuses missions d'étude qui viennent des différentes universités du pays et rarement de l'étranger où le site est connu « parfois mieux qu'ici », glisse-t-il. Le civisme n'est pas la vertu la plus partagée par nos concitoyens. On rapporte le cas d'un jeune qui a « vandalisé » des nids de rapace et de tel autre qui aurait emporté carrément les petits. Dans l'immense parc, des vaches paissent tranquillement malgré les interdictions. « Nous avons, au début, verbalisé, mais il vaut mieux recourir à la persuasion qu'à la brutale répression », nous dira un conservateur divisionnaire des forêts. Pour lui, « l'arrivée du gaz à Theniet El Had a eu un effet bénéfique, les riverains recourant très peu désormais au bois ». Le phénomène de déforestation n'atteint pas les mêmes proportions qu'à Yakourène, en Kabylie, ou à Belezma, dans les Aurès. Les trafics de bois et la lutte antiterroriste ont dénudé de vastes espaces dans ces régions. Relancer le tourisme Le parc n'est pas si loin d'Alger (180 km). La cédraie qui s'étale sur 1.000 ha n'a pas été affectée par les incendies. Elle forme aussi un contraste saisissant avec la ville qu'elle surplombe. Avec ses bâtiments et ses arbres coiffés d'horribles sachets en plastique, elle ne donne pas envie de s'y attarder. Sans compter que ce chef-lieu de daïra ne compte encore aucun hôtel pour séjourner et aller à la découverte d'un flanc des montagnes de l'Ouarsenis. Le terrorisme avait affecté la région. En 1994, à la sortie de Theniet El Had, un carnage avait décimé un cortège officiel. Le wali et 18 membres de la délégation officielle sont tombés dans un guet-apens sur les lieux où s'érige une statue rappelant le sacrifice de ces hommes. Ces temps paraissent lointains. Beaucoup de paysans qui avaient quitté leurs douars, comme El Chaâba, sont retournés sur leurs terres. Les autorités songent davantage à relancer des secteurs comme le tourisme. Saâd Khizraoui, le directeur du tourisme, évoque les trois pôles structurants d'un schéma de développement élaboré par le Cneru. Ils s'articulent autour de Tissemsilt, Sidi Slimane et Theniet El Had, censés redonner du dynamisme à l'activité et valoriser les potentialités que recèle la wilaya. « Un effort doit être fait en matière de promotion pour cette wilaya dont on connaît peu », nous dit-il. « Nous envisageons de moderniser le thermalisme dans la station de Sidi Slimane, localité située à 60 km au nord de Tissemslt, d'encourager les manifestations folkloriques comme les waâdas (offrandes collectives, ndlr) », a-t-il ajouté. Le barrage de Kodiet Errosfa, d'une capacité de 75.000m3, selon notre interlocuteur, « va, également, faire naître, sur ces berges, des activités touristiques qui séduiront les amateurs de la nature ». Le Parc national de Theniet El Had est tout indiqué pour l'éco-tourisme. La forêt d'El Meddad, comme l'appellent les natifs de la région pour la hauteur de certains cèdres qui atteignent plus de 30 m, ravit le visiteur. Se promener à l'ombre des majestueux cèdres, s'enfoncer dans la forêt ou faire une halte sur le gazon à l'orée d'une clairière fait oublier les milieux anxiogènes. En cette journée printanière de lundi, nous avons découvert ce parc où, à chaque tournant, la nature charme. Belvédères, éboulis, murmures des eaux cristallines qui coulent. Le bal gracieux des oiseaux, faucons et corbeaux dans le ciel accentuent ce sentiment d'un bonheur à faire partager.