Le notaire Rahal, 84 ans, a eu du mal à se mettre debout devant la barre pour répondre aux questions du juge, Menouar Antar. Ce dernier a ordonné de ramener une chaise pour mettre à l'aise l'accusé, toujours en détention après avoir été condamné à 10 ans de prison ferme durant le premier procès en 2007. Questionné sur les raisons qui l'ont poussé à affirmer que Abdelmoumène Khelifa a effectué le versement de 125 millions dinars qui représentent le quart du capital de la SPA Khalifa Bank alors que l'enquête révèle que 84 millions de dinars y ont été versés, Me Rahal explique qu'il y a confusion entre le rapport de l'enquête, qui mentionne le versement, et ses déclarations qui précisent qu'il s'agit de libération. « Je n'ai jamais dit qu'il s'agissait du versement des 125 millions de dinars, mais de la libération du capital par les actionnaires au moment de la signature de l'acte de constitution de la banque Khalifa », rectifie le notaire qui avoue que cette affaire n'est entâchée d'aucune irrégularité ou trafic. « Dans quel intérêt allions-nous faire dans le trafic ? », s'est interrogé le notaire. Il explique au juge qu'il avait tout un dossier sur la constitution de la banque, mais de retour de France, il n'a trouvé aucun document car les enquêteurs les ont pris. Le juge revient à la charge et lit les déclarations d'Amar Rahal au juge d'instruction, lui rappelant qu'il a été interrogé sept fois par le juge d'instruction et qu'il avait fait presque les mêmes déclarations. Le magistrat lui signale l'existence d'une attestation qu'il avait signée indiquant que le souscripteur au capital de la SPA Khalifa Bank avait déposé les 125 millions de dinars à la Banque d'Algérie. « Je suis surpris par cette attestation. J'ai 30 années d'expérience et je n'ai jamais fait d'attestation », répond le notaire, expliquant au juge que la Banque d'Algérie n'acceptera jamais le versement des trois autres quarts du capital si la procédure du premier versement n'avait pas été respectée. « Abdelmoumène Khalifa a, par la suite, complété le versement, soit les 37 millions pour atteindre les 50 millions de dinars qui représentent le capital de la SPA Khalifa Bank. Nous avons tous les documents et nous allons vous les présenter », argumente l'accusé. « Monsieur Rahal, le dossier que nous avons entre les mains, et sur la base duquel nous vous jugeons, indique que vous avez attesté le versement de 125 millions de dinars alors que la Banque d'Algérie ne confirme que 84 millions de dinars », souligne le président de l'audience qui passe au deuxième point qui concerne la modification du statut de la banque après la démission d'Ali Kaci de son poste de DG et la vente de ses actions. Sur ce point, le juge explique à l'accusé qu'il n'a pas respecté la loi 139 relative au crédit et à la monnaie qui stipule que lorsqu'il s'agit d'une modification du statut d'une banque, il faut une autorisation au préalable de la Banque d'Algérie. « Pourquoi n'avez-vous pas respecté ce dispositif important ? », interroge le juge. « D'habitude, dans ce genre de changement de statut, on élabore le dossier et on laisse aux intéressés le soin de s'occuper du reste de la procédure », répond le notaire qui atteste également que le dossier de l'hypothèque de la villa de Hydra et le fonds de commerce qui appartiennent à la famille Khelifa a été élaboré selon la loi. Issir Idir : La BDL de Staouéli n'a jamais accordé de prêt pour la création de Khalifa Bank Accusé d'association de malfaiteurs et complicité de faux et usage de faux, l'ex-DG de l'agence de la banque BDL de Staouéli, Issir Idir, a affirmé qu'Abdelmoumène Khalifa n'a pas contracté de crédit auprès de son agence pour la création de la banque Khalifa. Selon lui, le prêt bancaire a été accordé pour la société KRG Pharma. Concernant les deux actes d'hypothèque, il nie complètement leur existence. Le juge intervient pour lui rappeler que lors de son audition devant le juge d'instruction, il avait déclaré qu'il était présent lors de la signature de l'acte d'hypothèque concernant le local commercial. Concernant les faits qu'il lui sont reprochés, il lance : « C'est le fruit de l'imagination de mes accusateurs. » Abdelmoumène Khelifa, appelé à la barre, a expliqué que la première phase de constitution de Khalifa Bank au capital de 50 millions de dinars a nécessité une année de préparation pour avoir l'autorisation finale en septembre 1998. Il a rappelé que la procédure prévoit une autorisation provisoire d'abord qui est conditionnée par l'existence des statuts de la société, du capital et du registre du commerce pour pouvoir mettre en place tout le dispositif et l'acquisition des structures. La deuxième étape prévoit une activité d'une année pour pouvoir obtenir l'autorisation finale. Suite à ces réponses, le juge invite les défenseurs de l'accusé à lui poser des questions. « L'activité au quotidien à la banque se résume à gérer les comptes et en fin de journée à la collecte de l'argent dans la caisse principale de la banque. Cet argent était directement versé à la Banque d'Algérie le lendemain », répond l'accusé. Il enchaîne avec les bénéfices de Khalifa Airways estimés à 105 millions d'euros pour dire que cet argent était en majorité versé dans les comptes personnels des actionnaires. Sur les bons de caisse octroyés par la BDL, il explique qu'ils étaient enregistrés par les services des impôts et qu'ils ont servi au fonctionnement de l'entreprise pharmaceutique KRG Pharma. Abdelmoumène Khelifa soutient que c'est grâce aux bénéfices engendrés par son entreprise pharmaceutique qu'il a pu créer Khalifa Bank. « Nous étions les premiers à obtenir un agrément pour la production de médicaments après le groupe Saidal. Nous avons fait des milliards de bénéfices », explique l'accusé qui propose de mettre à la disposition du juge le rapport de l'enquête effectuée par les Français sur les filiales de Khalifa Airways et KRG Pharma en France. Sur sa fuite à l'étranger, l'accusé affirme qu'il n'a jamais eu l'idée de quitter le pays. « J'ai voulu contribuer au développement économique de mon pays. »