Apulée continue d'être une source intarissable d'où puisent encore des écrivains du monde entier. Par ses empreintes impérissables, le fils de Madaure, selon eux, a dessiné une nouvelle ligne que ses contemporains considèrent révolutionnaire. Apulée était à la fois romancier, philosophe et grand rhéteur. Un « touche-à-tout », en somme. Son chef-d'œuvre, le roman écrit en latin, « Métamorphoses », également connu sous le titre « L'Âne d'or », a fait sa renommée. « Sa place dans la littérature mondiale est connue et reconnue », affirment tous les conférenciers. Après le constat partagé, sont venues les interrogations. Une myriade de questions soulevées attendent des réponses. Afulay écrivit-il en tamazight ? Parlait-il cette langue ? Etait-il amazigh ? Est-ce que c'est la décadence qui a fait Apuleius ? Quelle est la place de l'amazighité dans ses œuvres ? Quelle influence a-t-il eu sur l'humanité ? Autant de questions qui continuent de tarauder l'esprit des chercheurs et historiens. Elles alimentèrent un débat riche et passionné hier à la salle des conférences Tahri-Miloud. Les trois visages d'Apulée Arezki Metref a indiqué qu'on peut supposer que sa langue peut être tamazight. Notre confrère dira que le latin et le grec étaient les deux langues dominantes de l'époque. Cela explique son choix pour celles-ci ». Il estimera surtout que « le romancier a bel et bien amorcé un tournant dans l'histoire de la littérature, jusque-là basée uniquement sur des chants lyriques ». Plus affirmatif, Dahmani Saïd, professeur à l'Université d'Annaba, a soutenu qu'« Apulée parlait bel et bien la langue de sa mère ». Il a réfuté l'idée qu'Apulée ait émergé dans une époque de décadence. Bien au contraire, il a fait savoir que l'époque où écrivait le fils de Madaure n'était pas celle d'une décadence. Quelle est la place de l'amazighité dans l'œuvre d'Apulée ? Professeur de l'enseignement supérieur à l'Université Mohamed-Premier Oujda, Banhakeia Hassan, a surtout voulu répondre à cette question. Il a indiqué qu'Apulée était « omniprésent » dans les anciens textes de la Numidie. Une foultitude de ces derniers évoque cette culture, dont le très célèbre « Les Transformations » qui a sa place dans la littérature mondiale et continue de fasciner. « Le texte a été élaboré et écrit à partir d'un imaginaire, d'une vision du monde mâtinée de quelques réflexions purement locales. » « Apulée s'est inspiré de la culture maternelle, pour la greffer dans le texte romanesque afin de nous montrer que cette essence amazighe est toujours là et que ne pouvons pas s'en séparer », soulignera-t-il. Abordant l'influence d'Apulée sur la littérature mondiale, M. Banhakeia a rappelé la longue liste d'écrivains occidentaux qui se sont inspirés des écrits d'Apulée, à l'image de William Shakespeare dans « Le Songe d'une nuit d'été », et de La Fontaine. Le même conférencier a estimé que cet immense écrivain nous a légué, à travers ses écrits et ses œuvres, trois images différentes. Apulée le Grec, Apulée le Latinophone et bien sûr Apulée mi-gétule mi-numide coexistent. « Il est tout simplement amazigh. C'est lui-même qui revendiquait son appartenance numide et gétule », a conclu l'intervenant. La conférence du Tunisien Njim Adel, maître-assistant au département histoire de la faculté des lettres et sciences humaines de Sfax, a suscité par contre une vive controverse. Dans son intervenions portant sur l'identité onomastique africaine antique, il a affirmé que « tous les prénoms berbères sont originaires de l'Arabie ». A l'en croire, le fils de Madaure ne s'appelait pas Apulée mais « Abou Laïth ». Ses propos ont suscité à la fois déception et étonnement parmi l'assistance qui a reproché au conférencier son amateurisme et ses déclarations sans fondement. Il a d'ailleurs fait son mea-culpa. Il a reconnu « s'être trompé et se considère toujours amateur dans un univers de recherche vaste et profond ».