Rafik Abdelmoumène Khelifa « n'était pas qualifié pour gérer une banque selon les normes professionnelles et la règlementation en vigueur », a indiqué, hier, devant le tribunal criminel de Blida, le vice-gouverneur de la Banque d'Algérie, Ali Touati. Touati, qui avait présidé la réunion de la commission bancaire pour le retrait d'agrément à Khalifa Bank le 29 mai 2003, a expliqué qu'« à l'issue d'une séance de travail tenue avec Abdelmoumène Khelifa le 18 octobre 2001, j'avais la certitude que cette personne n'avait pas la capacité de gérer une banque selon les règles professionnelles ». Rejetant le « postulat », faisant le lien ente la décision de suspension du commerce extérieur de Khalifa et sa banqueroute, le vice-gouverneur de la BA l'a qualifié d'« aberration », précisant qu'il n'y a aucune « relation entre la rentabilité, la solvabilité d'une banque et le commerce extérieur » étayant ses propos par le fait que « la CNEP qui détient un taux de solvabilité deux fois supérieur n'a jamais fait de commerce extérieur ». Celui qui a signé la décision de retrait d'agrément à Khalifa Bank a indiqué que la décision de suspension du commerce extérieur prise par la direction générale de change et confortée par la commission bancaire était conforme à la loi, sachant que la commission bancaire « peut s'emparer de n'importe quel dossier ayant trait à son domaine d'intervention ». Ali Touati a affirmé qu'il avait envoyé dès 2001 un rapport au ministère des Finances contenant les anomalies et les infractions notamment liées au mouvement des capitaux vers l'étranger, parce qu'il était convaincu dès 2000 que les « choses ne tournaient pas rond » dans cette institution financière, et qu'il s'attendait à une réaction de ce département, lequel avait considéré ledit rapport « insuffisant pour actionner la justice parce qu'il péchait par absence des procès-verbaux ». Revenant sur l'option de la liquidation, Touati, qui a qualifié Khalifa Bank d'« ingérable », a souligné que « Rafik Abdelmoumène Khelifa n'a jamais fait de demande formelle de recapitalisation », ajoutant, toutefois, que « la démarche était pratiquement impossible » du fait du refus des actionnaires d'apporter un soutien financier et l'impossibilité de la BA de refinancer faute d'effets de garanties des actifs alors que sa proposition de recapitaliser par les actifs de Khalifa Airways aurait été l'escroquerie du siècle. « La Banque d'Algérie ne pouvait monétiser une banque frauduleuse. On aurait été pointé du doigt par le monde entier », a-t-il lancé. Des commissaires aux comptes défaillants Il a indiqué que les « commissaires aux comptes auraient dû enclencher les procédures d'alerte auprès de la Banque d'Algérie et même du parquet, car il y avait, outre le manquement aux règles prudentielles comme le respect de ratio de solvabilité, des faits qui relevaient du pénal », citant notamment « les comptes d'ordres qui contenaient l'argent des épargnants, distribués aux filiales du groupe sans dossier d'une manière illicite », et le non-rapatriement des devises de Khalifa Airways trimestriellement comme le stipule la loi. Par ailleurs, les avocats du milliardaire déchu ont mis l'accent lors de leur intervention sur la célérité avec laquelle a été « prise la décision de liquidation », relevant que l'administrateur, Mohamed Djellab, avait été nommé le 25 février 2003 et son installation ne s'était faite que le 2 mars de la même année alors que la nomination du liquidateur s'était faite concomitamment avec la décision de retrait de l'agrément à Khalifa Bank le 29 mai 2003.