Photo : Makine F. Stress, stress et schizophrénie, anxiété et dépression, stress et psychosomatique. Hier, cette maladie des temps modernes a été décortiquée sous toutes ses coutures par des psychiatres réunis à Alger à l'occasion des 6es journées médico-psychologiques. Les spécialistes sont arrivés à cette conclusion : les Algériens sont globalement des gens stressés et il est temps de se pencher sur cette «épidémie». Et cette rencontre a justement pour objectif de faire l'état des découvertes pour mieux appréhender le stress devenu le «poison» de la vie actuelle. Pour le professeur Mohamed Tedjiza, président de la Société médico-psychologique algérienne (SMPA) et chef de service de psychiatrie à l'hôpital de Drid Hocine, cette journée a pour but de faire bénéficier les médecins d'une formation continue dans ce domaine devenu un problème de santé publique. L'autre objectif est de «traiter» un stress omniprésent dans la vie quotidienne et qui provient de trois situations. La première est liée aux catastrophes naturelles ou artificielles comme les guerres. Sur ce point de vue, des études ont été réalisées sur l'impact de la bombe Hiroshima, les camps de concentration nazis, les viols massifs des femmes et l'émigration. Ces catastrophes ont des conséquences considérables sur les vies humaines. «Il suffit d'une catastrophe comme le séisme de Boumerdès en 2003 ou les inondations de Bab El-Oued en 2001 pour créer un choc émotionnel énorme», souligne le Pr Tedjiza. La deuxième catégorie de stress survient lors des modifications qui surviennent au cours de l'existence. Le président de la SMPA explique qu'une échelle d'ajustement social a été mise au point avec 43 items. Par exemple, la mort d'un conjoint est cotée, ainsi que la maladie, la perte de travail, le deuil, l'emprunt d'argent. Et chaque item de vie requiert un effort d'adaptation. La troisième partie concerne les petits tracas de l'existence. «L'embouteillage récurrent sur les autoroutes, les files d'attente dans les mairies pour retirer des papiers administratifs, les disputes entre les voisins ou les ménages, les nuisances sonores… sont autant de facteurs qui provoquent le stress», précise Halim Addane, psychiatre à Tizi-Ouzou. «Ces réitérations de choses vont se conjuguer pour aboutir à des tableaux chroniques. A force de s'accumuler, ces petits stress deviennent chroniques», précise le psychiatre. Et dire qu'une «émotion défavorable sur l'être humain peut se répercuter sur sa santé», renchérit le Pr Tedjiza. Pour ces différentes «maladies», les individus doivent t-ils consulter un psychologue ou un psychiatre ? «C'est évident, il est même nécessaire, soutient le Pr Tédjiza, car la consultation ne nécessite pas automatiquement une ordonnance, mais un accompagnement pour mettre de l'ordre dans la vie de la personne affectée». Pour ce professionnel de la santé, il n'est pas important de se faire hospitaliser, mis à part les personnes suicidaires ou schizophrènes car la prise en charge se fait à titre externe avec des psychologues ou des psychiatres. Abondant dans le même sens, le Dr Adja, psychiatre, recommande le traitement du stress sous toutes ses formes «afin d'éviter qu'il se transforme en maladie chronique». Reste un problème. Dans notre pays, le psychiatre est regardé par le petit bout de la lorgnette. «Chez nous, le psychiatre est stigmatisé, les gens le croient destiné aux fous alors que ce n'est nullement le cas. La psychiatrie s'occupe de tous les problèmes en rapport à la santé et l'équilibre émotionnel de l'individu», explique le Dr Adja.