Un train qui roule à 160 km/h et qui mettrait Alger à portée de Bejaïa pour à peine deux heures de route ? Le rêve pour les Bejaouis qui, pour l'instant, cauchemardent sur la RN26 à cause d'une circulation étranglée et dangereuse. La perspective de la réalisation prochaine de la pénétrante qui connecterait la wilaya à l'autoroute Est-Ouest, un moment perçue comme la solution ultime, ne les déride pas, sachant que cette fameuse autoroute ne les délivrera pas de sitôt de leur calvaire, le tronçon Bouira-Lakhdaria s'est transformé, pour cause de malfaçons, en étroit entonnoir. Regarder les vaches paître à travers la vitre d'un wagon de train est, par la force des choses, devenu le rêve de tout voyageur en partance de ou vers Bejaïa. Mais ce projet, qui a eu le mérite de survivre aux récentes coupes budgétaires, certainement en raison de son importance économique, saura-t-il sortir des cartons de ses concepteurs pour trouver un début de concrétisation ? Le dédoublement de la voie ferrée Beni Mansour-Bejaïa et rectification du tracé, c'est son intitulé, s'est heurté, dès sa première tentative de lancement, à une forte opposition des citoyens touchés dans leurs propriétés par le tracé retenu. L'Agence nationale d'études et de suivi de la réalisation des investissements ferroviaires (Anesrif) avait estimé les conséquences en la destruction de 65 constructions au niveau des localités dépendant de la wilaya de Bouira et 482 constructions sur le territoire de Bejaïa, dont 15 unités économiques (laiterie, limonaderie, poulailler, etc.). Ces constructions sont situées à Boudjelil (89), Tazmalt (57), Akbou (163), Ouzellaguen (23) et Souk Oufella (68), soit une superficie de 120 hectares environ. Le président de l'Association de défense des intérêts des citoyens, opérateurs économiques et industriels de la Soummam, Khoder Aït Braham, avait contesté ces chiffres, indiquant que ce sont 1.600 maisons, 324 unités industrielles et 8.000 postes d'emploi qui sont menacés, en sus de 7 cimetières, 3 mosquées et 3 écoles. Les contestataires ont précisé ne pas s'opposer à ce projet, mais au tracé retenu dont l'étude a été menée sans consultation ni prise en compte des doléances de la population. Les « belligérants » s'étaient néanmoins quittés avec la promesse d'organiser des réunions pour trouver une solution satisfaisante pour toutes les parties. La récente visite du ministre des Transports a révélé que la situation n'avait pas évolué d'un iota et que le projet souffrait d'une contestation sur pratiquement 30% du tracé. Suite à cette visite, le wali de Bejaïa a provoqué une réunion de travail avec les représentants de l'Anesrif et la participation, outre les directeurs de l'exécutif de la wilaya, des présidents d'APC et des chefs de daïra concernés par ce projet. Lors de cette rencontre, un nouveau tracé leur a été présenté, minimisant l'impact sur les habitations et les entités économiques, de sorte que les opérations de démolition ne concernent désormais que 107 habitations et 14 unités industrielles. La balle est désormais dans le camp adverse et les prochaines semaines montreront si la situation va à son dénouement et le lancement effectif de la réalisation de ce projet qui tient à cœur toute la région. Le projet, qui ambitionne de faire gagner du temps aux citoyens et agents économiques en permettant la circulation de 9 trains par ligne/jour et de réduire le temps de déplacement de 1 heure 30 minutes aujourd'hui sur le trajet Beni Mansour-Bejaïa à seulement 30 minutes, et de transporter 130.000 voyageurs/jour et 18.000 tonnes/j de marchandises, boosterait à n'en point douter la dynamique de développement de la région. Courant sur un linéaire de 87 km, le projet prévoit la réalisation de 21 ponts rails et viaducs, 34 ponts de franchissement des axes routiers et 3 tunnels. Il s'agit également de construire 9 nouvelles gares (Beni Mansour, Tazmalt, Akbou, Ighzer Amokrane, Takriets, Sidi Aïch, Ilmaten, El Kseur et Bejaïa) ainsi que 4 haltes. En matière de signalisation, la ligne sera équipée du système ETS niveau 1 et d'une signalisation latérale, et d'un système de télécommunication de type GSM-R avec téléphonie de gestion et de sécurité. Confié à Cosider TP, comme chef de file, le délai de livraison avait été arrêté à 60 mois, soit initialement en juillet 2019.