Les textes des deux pays qui ne sont pas divergents sur le fond, s'opposent néanmoins sur un point : l'avenir du président syrien Bachar el-Assad. Le projet des Russes, version revue et corrigée de celui qu'ils ont présenté le 30 septembre et récusé séance tenante par la Grande-Bretagne, insiste sur l'implication du régime syrien dans cette guerre contre le groupe terroriste qui a revendiqué les récents attentats de Sousse, Ankara, Beyrouth, Paris et contre un avion de ligne russe dans le Sinaï égyptien. François Delattre, l'ambassadeur français, espère faire adopter son « court, fort et centré texte sur la lutte contre Daech » dans les prochains jours. Ce texte « demande aux Etats qui ont la capacité de le faire de prendre toutes les mesures nécessaires (...) pour redoubler d'efforts et coordonner leurs efforts afin de prévenir et stopper les actes terroristes ». Le texte qui fait référence à des mesures prises sur le territoire sous le contrôle de Daech en Syrie et en Irak invite les pays à « intensifier leurs efforts pour empêcher leurs citoyens de rejoindre les rangs de l'organisation terroriste en Syrie et en Irak et tarir ses sources de financement ». Quid des raids menés en Syrie et Irak sans autorisation de l'ONU ? « Les raids aériens français ont pour base légale l'article 51 de la charte de l'ONU qui permet à tout pays de se défendre contre une attaque », dit-il espérant faire adopter ce texte « au plus tard au début de la semaine prochaine ».Vitali Tchourkine, son homologue russe, pense que le texte de son pays est « acceptable » pour tous ceux qui veulent vraiment lutter contre le terrorisme. « En termes de légalité internationale, un accord avec le gouvernement syrien est très important » et « le tenir à l'écart aboutirait à affaiblir une riposte unie », explique-t-il rappelant que pour Moscou, Daech n'est pas le seul groupe terroriste opérant en Syrie. Matthew Rycroft, l'ambassadeur britannique qui préside le Conseil en novembre, ne parage pas l'« optimisme » de son homologue russe. « Le texte russe ne tient pas compte des préoccupations exprimées fin septembre par plusieurs pays », dit-il affichant son soutien au projet français. Une chose est sûre. La présentation de deux textes par deux pays qui ont été victimes du même ennemi fait désordre. Elle pourrait « poignarder », selon plusieurs observateurs, la récente solidarité affichée des Russes, des Français et des Américains contre le terrorisme. Régime et rebelles négocient une trêve en Syrie Des groupes rebelles syriens dont Jaich al-Islam (l'armée de l'islam), considéré comme le plus important groupe rebelle dans la Ghoutaâ orientale et l'armée du régime tentent depuis mercredi dernier de parvenir à une trêve de 15 jours dans cette région située à l'est de Damas, en présence de médiateurs russes ou iraniens. Si les deux parties parviennent à un accord, « un cessez-le-feu » débutera jeudi prochain. Les points de divergence porteraient sur l'acheminement des aides humanitaires et la libération de détenus de la communauté alaouite. Plusieurs trêves ponctuelles ont été conclues entre le régime et les rebelles dans certaines régions du pays. Selon l'envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, un cessez-le-feu général lié à l'ouverture d'un dialogue politique devant se tenir à Genève, pourrait être instauré. « Il s'agit d'une occasion pour l'opposition syrienne de venir et d'être aussi inclusive et bien préparée », dit-il demandant aux pays qui ont la capacité d'influencer ceux qui se battent de le faire. « Nous avons déjà la liste des 40 représentants du gouvernement syrien. Nous savons qui les dirigera lors des pourparlers de Genève mais il est extrêmement important d'avoir un [groupe] d'opposition inclusif, complet et faisant preuve de cohésion », déclare l'envoyé spécial. Est-ce le début d'une issue à la crise syrienne ? A voir le rapprochement des Français, des Américains et des Russes pour s'attaquer à Daesh, il y a lieu de le croire. « On ne gagnera pas la guerre avec nos seuls avions. Il faut des troupes au sol. Et, pour avoir des troupes au sol, il est urgent de mettre fin à la guerre civile syrienne », affirme Gérard Araud, l'ambassadeur français aux Etats-Unis. Autrement dit, tout le monde veut aujourd'hui trouver une solution politique à cette crise qui serait acceptée et par l'opposition et par le pouvoir.