Les innovations technologiques liées à la santé et au bien-être connaissent un développement prodigieux. Portées, notamment par l'explosion du marché des objets connectés, elles investissent de nombreux domaines de la santé, apportant des fonctionnalités nouvelles capables d'aider à l'amélioration des conditions de soins des malades. Les opérateurs de divers horizons investissent le créneau avec des objectifs certes différents mais tous mus par le souci d'apporter de nouvelles solutions à la souffrance et à la maladie de l'homme. Au premier rang, les géants de l'internet ont déjà entrepris cette quête de suivi de la santé avec une course effrénée entre les grandes multinationales américaines. Pour rappel, Google a défrayé la chronique il y a quelque temps lorsque ses responsables ont dévoilé le projet Calico destiné à financer la recherche, notamment sur l'allongement de l'espérance de vie. « 425 millions de dollars pour 500 ans d'espérance de vie humaine : ce que nous réserve le combat de Google contre la mort », ouvrait en titre, au mois de mars dernier le site atlantico.fr lors de son compte rendu de presse relatif à une activité de « Bill Maris, l'homme à la tête de Google Ventures, le fonds de placement de l'entreprise chargé d'investir dans les jeunes start-ups digitales », qui a eu 425 millions de dollars « à placer où il veut », et qui s'est tracé comme objectif d'investir « les start-up qui travaillent sur des méthodes de prolongation de la vie. Le but : tuer la mort. » D'après ce site, ce responsable est le fidèle traducteur de la philosophie transhumaniste des patrons de Google : « Si vous me demandez si l'on pourra vivre 500 ans, la réponse est oui », a-t-il déclaré en réponse à une question de journaliste, note atlantico.fr qui revient à l'occasion sur ce courant transhumaniste proné par les deux plus hauts responsables du moteur de recherche. Interrogé par ce site à l'occasion de l'élaboration d'un dossier spécial sur la question, l'enseignant universitaire et entrepreneur français Fabrice Epelboin a expliqué cet intérêt de Google ainsi : « L'objectif poursuivi par Google est de devenir le leader d'un courant philosophico-techno-politique pour le moment assez confidentiel mais appelé à un grand avenir : le transhumanisme ». Ce courant de pensée existe depuis l'antiquité et repose sur le principe de « l'usage des sciences et des techniques, ainsi que de la spiritualité afin d'améliorer les caractéristiques physiques et intellectuelle des êtres humains », explique atlantico.fr qui ajoute que face aux limites imposées au corps humain, « deux voies non exclusives sont à considérer : le transhumanisme, qui utilise l'ingénierie biologique, et le posthumanisme qui se fonde sur les prothèses. » Ainsi, Google a-t-il investi ce créneau en lançant en 2014, « un projet qui consiste à détecter les maladies 5 à 15 ans avant qu'elles n'apparaissent », nous dit le site atlantico.fr en faisant dire, à un autre universitaire français, Jean-Michel Besnier, professeur à la Sorbonne, que « les objectifs de Google sont, sans doute, d'abord platement économiques : monopoliser les datas qui sont le gage de tout enrichissement dans l'avenir ». La bataille des géants C'est un autre terrain de bataille sur lequel se confrontent les géants de l'internet. Pionnier en la matière, l'autre mastodonte américain Apple n'est pas loin. Lui aussi a beaucoup fait parler de lui par ses multiples applications dédiées à la santé. Lors de la présentation de la dernière version de son système d'exploitation mobile IOS9, la firme à la pomme a surpris beaucoup de mode par la diversité et l'originalité des applications proposées. « Parmi toutes les nouveautés plus ou moins révolutionnaires, la marque à la pomme surfe sur la tendance du moment avec son application Health », note le site www.electrogen.fr qui souligne qu'en plus de « la possibilité de suivre ses courbes de poids, ses activités sportives ou encore la qualité de son sommeil, Health intègre désormais un suivi de l'activité sexuelle ». Le site donne ne série d'indicateurs de fertilité comme « les périodes de menstruation, de spotting, la qualité de la glaire cervicale ou encore la température corporelle », qui passent inaperçus aux yeux de profanes mais qui, ajoute-t-il, « permettent pourtant aux femmes d'identifier plus facilement les jours propices pour concevoir un enfant. » Si la rivalité est affichée entre les grandes multinationales, le terrain est également ouvert à d'autres opérateurs tant les applications et autres terrains d'expérimentation sont nombreux. « Sport, sommeil, posture, diabète..., les applications santé fleurissent dans la Silicon Valley », indique le site cafetech.co affirmant que depuis « la recherche du bien-être quotidien au suivi médical, Apple et Google ne sont pas les seuls à miser sur le sujet. » Avec le développement des objets connectés, les applications se multiplient, notamment pour l'analyse de données. « Les applications de suivi d'activités sportives, comme Runtastic ou Runkeeper qui enregistrent des performances physiques et permettent de les analyser, font désormais face à pléthore de concurrents », souligne ce site qui explique cela entre autres par l'offre démultipliée de nouvelles applications rendue possible par l'arrivée sur le marché de vêtements connectés. Terrain de prédilection pour ces nouvelles innovations, les Etats-Unis son réputés pour les coûts exorbitants de leur système de santé. Dans ce pays « où la moindre consultation médicale peut coûter plusieurs centaines de dollars et une hospitalisation des dizaines de milliers, la demande en matière de santé digitale est pourtant particulièrement forte », relève electrogen.fr qui fait remarquer que les applications liées aux activités de santé et de soins se multiplient, allant « de l'aide au diagnostic aux visites à domiciles - à l'image de Medicast sorte de Uber médical -, en passant par le suivi à distance de patients - comme iRhythm qui enregistre l'activité cardiaque ». Prenant comme exemple les applications liées au suivi de la maladie du diabète, le site évoque deux expériences lancées aux Etats-Unis et en Autriche, pour dire que les investisseurs semblent convaincus par la pertinence du créneau économique. Il évoque le cas de « Glooko qui permet aux médecins d'effectuer un suivi connecté de personnes souffrant de diabète », pour relater l'expérience de cette jeune start up qui « a par exemple levé 16,5 millions de dollars au mois de mars », précisant qu'elle est « incubée dans la baie de San Francisco, propose une plateforme simplifiant la récolte et l'analyse de données fournies par les patients. » Et le site de revenir en Europe avec cette start-up autrichienne, « MySugr » a de son côté annoncé avoir réuni 4,8 millions une semaine auparavant. Le Boom des applications santé Les usagers s'impliquant de plus en plus dans la gestion de leur comportement, aidés en cela par les capacités de connexion mobile, boostent la demande en matière d'applications de santé. « En quelques années, les nouvelles technologies ont marqué une véritable rupture dans le domaine de la santé. Du recueil de données en masse (big data), à l'impression et l'imagerie 3D, en passant par la télémédecine, les objets connectés et les applications mobiles de suivi médical et d'automesure, la high-tech qui soigne s'impose un peu plus chaque jour dans le quotidien d'un très large public », lit-on sur le site lesnumeriques.com qui a consacré un long papier dans lequel il a fait le tour des innovations en rapport avec la santé humaine. Son rédacteur recense le potentiel des capacités technologiques pouvant influer sur le développement des applications de santé : « Des supercalculateurs basés sur les techniques de deep learning (apprentissage profond des machines) pour détecter des cellules déficientes sur des imageries médicales, des implants cochléaires capables de redonner l'ouïe à des personnes sourdes, des rétines artificielles qui rendent la vue à des aveugles, des implants crâniens imprimés en 3D qui permettent de réparer des liaisons complexes du crâne, voici quelques-unes des plus spectaculaires innovations technologiques et scientifiques apparues ces dernières années », écrit-il. Comme beaucoup d'autres prospectivistes, le journaliste de ce site n'exclut pas l'avènement dans un proche avenir d'autres « innovations dignes d'un film de science-fiction », qui pourraient prendre la forme, indique-t-il, de « cœurs artificiels autonomes, prothèses bioniques des yeux, exosquelettes pour les bras et les jambes, nano-implants pour éliminer complètement les douleurs, cellules souches permettant de retrouver la mémoire. » Cette prodigieuse évolution n'est pas sans susciter un débat « éthique » et même existentiel sur le devenir de telles innovations sur l'intervention de l'élément humain et de son rôle dans l'acte de soin. Ardent défenseur de l'utilisation de la machine et des robots dans la médecine, l'urologue français Guy Vallancien vient de mettre sur le marché un livre consacré à la question, sous le titre « La médecine sans médecin ? Le numérique au service du malade ». « Ardent défenseur des quelque 80 robots Da Vinci qui opèrent en France cancers de la prostate et affections gynécologiques » selon le site du journal français lejdd.fr qui fait la présentation de cet ouvrage, le médecin livre sa vision de l'hôpital et de la médecine de demain en confiant au journal français : « Nous entrons dans l'ère de la média-médecine où l'homme et l'automate travailleront en symbiose pour soulager la souffrance », ajoutant que « personne ne discute du bien-fondé du pilotage automatique en aviation. En plus du robot chirurgien ou anesthésiste, le robot infirmier sera bientôt en action. » D'après jdd.fr, il n'est pas question que de fiction, si l'on se réfère aux expériences bien avancées lancées dans certains pays. Convaincu que la réalité a déjà rattrapé la fiction, le journaliste de jdd.fr rapporte qu'aux « Etats-Unis, Tim Maguire, entrepreneur installé dans le New Jersey, a inventé une machine capable de faire des prises de sang ». Il cite ensuite cette autre innovation japonaise : « Hospi, un engin courtaud, 1,30 m pour 120 kg, est capable de distribuer les médicaments et de laver les cheveux des patients ». Il donne quelques indications techniques sur cet engin à la « bouille souriante d'ourson, Robear, 140 kg sur la balance, peut soulever un malade de son lit et le déposer en douceur sur un fauteuil roulant ou tout simplement l'aider à se lever. » Le site fait également cas d'une autre innovation, un autre robot baptisé présenté au printemps dernier et qui, écrit jdd.fr, « suit pas à pas l'infirmière dans les couloirs de l'hôpital, lui délivre des seringues, collecte les données médicales. » Revenant en Europe, le site fait état d'une expérience financée par le CHU de Liège, pour « 2,6 millions d'euros pour acheter deux robots chargés de préparer les médicaments ». Suffisant pour alimenter un débat sur le devenir des métiers paramédicaux. « L'idée première était de sécuriser la prise de médicaments en évitant les erreurs et, dans un second temps, de soulager les infirmières », explique Myrèse Radoux, pharmacienne au CHU, qui est à l'origine de ce projet, selon jdd.fr qui, lui aussi, se pose la question : « Les robots remplaceront-ils un jour les infirmières ? ». Le site donne la parole à deux autres intervenants qui estiment nécessaire le rôle de l'infirmière. « Le malade n'est pas un objet et le risque serait de transformer l'hôpital en usine à soins. Au-delà de son talent pour réussir une injection, l'infirmière défend la dignité du patient, l'aide à comprendre sa maladie ou à accepter l'idée que la fin de vie approche », argumente Thierry Amouroux, secrétaire général du Syndicat national des professionnels infirmiers, au site jdd.fr qui a également pris l'avis de Jocelyne Troccaz, chercheuse au CNRS, selon laquelle, « l'infirmière est celle à qui le malade peut encore parler un peu. »