Le marché Meissonnier, que ce soit pendant ou en dehors du mois de Ramadhan, est considéré comme l'un des plus grands centres « d'effervescence » de la capitale. Voir autant de monde papillonner dans ses locaux et à travers ses étalages est chose « normale » pour les Algérois. A l'époque coloniale déjà, d'après des illustrations, le marché ressemblait à une ruche. Le décor n'est plus le même, toutefois. Les ruelles sont toujours les mêmes mais les habitudes ont bien changé. A l'entrée du marché, des mendiants, des handicapés, ont choisi des endroits « stratégiques » pour attirer les bonnes âmes. Ils restent là, des heures, mais très peu leur accordent la charité. Les pensées des passants semblent tournées vers le marché et... les prix ! A l'intérieur, on entend déjà des ménagères grommeler contre les commerçants mettant tout le monde dans le même sac, que les gens soient aisés ou pauvres. Les rayons des fruits sont un vrai régal pour les yeux, où sont exposées de belles cerises rouges et des figues précoces bien mûres et de jolies pommes dans le rose et dans le vert.... sauf que rares ceux qui osent s'en approcher vu les prix affichés. Une ménagère a convaincu un commerçant de lui donner deux pommes, qui commencent à pourrir, contre 100 DA ! Leurs prix oscillent entre 420 et 500 DA. Sur l'un de ces étalages de kiwi, il est précisé sur un écriteau que quatre de ces fruits coûtent 200 DA. Estimant que ce n'est pas cher, une passante déclare que ces fruits sont sûrement « périmés ». Une sexagénaire s'est extasiée, juste à côté, de la qualité particulière des pêches très parfumées. « Ce sont des pêches de montagne. J'ai déjà acheté un kilo chez un autre marchand mais elles n'ont pas la particularité de celles-ci. Mais j'en prends quand même un kilo, elles sont succulentes », confie-t-elle au marchand de fruits. Les dattes ne semblent pas non plus attirer grand monde. Pourtant, c'est l'un des produits phare de ce mois sacré. Le marchand les proposent en vrac et les empaquettent sur place dans des emballages industriels. Le fait qu'elles soient congelées, vu que ce n'est pas la saison des dattes, rebute peut-être les consommateurs. Au rayon des légumes, la plupart des consommateurs achètent, vu les prix, par petites quantités. On entend ici et là des clients demander qu'on leur pèse du poivron ou de la tomate pour 100 DA, d'autres légumes pour 50 DA. On entend aussi des ménagères maugréer à propos de certaines feuilles de diouls (pâtes traditionnelles) connues pour leur qualité qui ne sont plus disponibles sur le marché. Le marchand qui les commercialise lui explique qu'elles sont tellement demandées qu'il y en a plus à partir du 10h. Toujours concernant ces pâtes, mais industrielles, cette fois-ci et bien emballées, l'un des marchands a mis une note sur laquelle il dit « diouls, sans sueur et sans microbes ». « J'ai précisé cela car les diouls industriels sont fabriqués avec des machines et non à la main qui peut transmettre des microbes et de la sueur », explique-t-il. C'est avec des couffins à moitié pleins que la plupart des ménagères se dirigent vers la sortie. Dans un couffin, seuls quelques bouquets d'épinards en occupent l'espace. A la sortie du marché, les mendiants sont toujours là. Mais les passants, préoccupés par le contenu de leurs couffins, ne semblent pas les voir....