Pour la célébration du 60e anniversaire de l'exécution d'Ahmed Zabana, premier patriote guillotiné par la France le 19 juin 1956, une rencontre a eu lieu, samedi dernier, à la librairie D'zaïr Chaïb à l'initiative de l'Anep. Le premier intervenant a été Fouad Soufi qui a passé sa vie aux Archives nationales. Il a publié des contributions dans six livres sur l'histoire de l'Algérie et la guerre de Libération nationale. Il envisage de participer à la publication d'un livre collectif sur les résistances algériennes. Après une minute de silence à la mémoire d'Ahmed Zabana, le chercheur au Centre de recherche en anthropologie social et culture (Crasc) a estimé que « l'homme se démarque par un parcours exceptionnel ». Il a retracé ensuite la vie et l'histoire du militant. Soufi a rappelé le rôle du chahid, de son vrai nom H'mida Zahana, qui avait contribué à la libération de l'Algérie. Il a évoqué la stature du personnage. « Ahmed Zabana est un militant important de l'OS. Il a évolué aux côtés de Ben M'hidi, Boussouf... Il faisait partie du groupe de choc du FLN en Oranie. Il ne sort pas du néant. Depuis pratiquement 1946, il militait en compagnie de ceux qui allaient déclencher la guerre de Libération », a-t-il affirmé. L'historien va plus loin, révélant des informations inédites sur le déroulement de la date du 1er Novembre 1954 à Oran. « L'histoire chez nous et surtout en France retient que le premier décès fut enregistré dans les Aurès. C'était l'instituteur Guy Monnerot. Historiquement, c'est complètement faux. La première victime, Cheriet Ali Cherif, s'est éteinte à Oran. « Il ne fut pas le premier à tirer. Sa mort fut un accident puisque les instructions des dirigeants du FLN indiquaient qu'il ne fallait pas tirer sur les civils. Cependant, il y a eu un incident. Les groupes chargés d'allumer la mèche du 1er Novembre ont pris un taxi dont le chauffeur ne s'est pas laissé faire. Il a été tué d'une façon involontaire, avant minuit. » Il a ensuite abordé son expérience dans la recherche historique. « C'est en 1993 que j'ai commencé à me poser des questions sur le 1er Novembre. J'ai préparé ce texte pour un colloque à Tunis. J'ai donc réalisé une contribution académique, en écrivant un article dans un livre paru à Tunis, sur le 1er Novembre et les différents acteurs de cet événement fondateur. » Il fera savoir, par ailleurs, l'absence d'ouvrages sur la date du 1er Novembre, sauf le livre de Mohamed Harbi. Selon lui, « on a un problème avec notre histoire, ses sources ». « Malheureusement, les archives ne sont pas mises à la disposition des chercheurs algériens. C'est dommage, on est obligé de se déplacer en France pour consulter des archives comportant la vision de ce pays », a-t-il ajouté. Il préconise de réglementer l'accès aux archives. Ultime lettre de Zabana à ses parents Mohamed Balhi, sociologue et journaliste, lira à l'assistance la lettre du chahid Ahmed Zabana destinée à ses parents, juste avant de passer sous la guillotine : « Mes chers parents, ma chère mère, je vous écris sans savoir si cette lettre sera la dernière et cela, Dieu seul le sait. Si je subis un malheur quel qu'il soit, ne désespérez pas de la Miséricorde de Dieu, car la mort pour la cause de Dieu est une vie qui n'a pas de fin et la mort pour la patrie n'est qu'un devoir. Vous avez accompli votre devoir puisque vous avez sacrifié l'être le plus cher pour vous. Ne me pleurez pas et soyez fiers de moi. Enfin, recevez les salutations d'un fils et d'un frère qui vous a toujours aimés et que vous avez toujours aimé. Ce sont peut-être là les plus belles salutations que vous recevrez de ma part, à toi ma mère et à toi mon père ainsi qu'à Nora, El Houari, Halima, El Habib, Fatma, Kheïra, Salah et Dinya et à toi mon cher frère Abdelkader ainsi qu'à tous ceux qui partageront votre peine. Allah est le plus Grand et il est seul à être équitable. Votre fils et frère qui vous aime de tout son cœur, H'mida. »