Connue pour ses ksour et son riche patrimoine immatériel, la région du Touat, qui couvre avec le Gourara et le Tidikelt une très grande surface du Grand-Sud, l'est moins, en revanche, pour ce qui a trait à son apport, pourtant considérable, dans le monde des sciences et du savoir. Certains historiens soutiennent que le pays des Zénètes fut, au XIVe siècle, un grand foyer de rayonnement scientifique et culturel grâce notamment à l'installation depuis le XIIe siècle, dans le coin, de plusieurs grands savants venus de Tlemcen et de Fès. C'est dans l'espoir de rendre son dû à l'histoire et remettre au goût du jour ces grands oulémas réputés dans les sciences religieuses et profanes, que deux universitaires, Abdallah Meguellati (université de M'sila) et M'barek Djaâfri (centre universitaire d'El Oued) ont publié un ouvrage cossu et fort intéressant « Dictionnaire des savants du Touat ». « Malgré son importance historique et civilisationnelle, ce grand territoire qu'est le Touat, n'a pas été au centre d'intérêt des chercheurs algériens », regrettent les deux auteurs dans l'introduction du livre édité par la maison El Ryassin, avec le concours du ministère de la Culture, dans le cadre du cinquantième anniversaire de l'Indépendance. En guise d'arguments, ces derniers prennent pour exemple l'éminent historien, le regretté Abou El Kacem Saâdallah, référence dans son domaine, lequel a reconnu, au sujet de son encyclopédie « L'histoire culturelle de l'Algérie », la rareté des documents touchant la région du Touat. Saâdallah avait alors expliqué que l'histoire et le lustre du Touat demeurent confinés dans les vieux manuscrits très peu sollicités par les chercheurs en histoire. Selon lui, l'autonomie de la gestion de ce territoire, durant le Moyen-Âge, et son éloignement, voire son isolement des grandes cités du Nord se sont négativement répercutés pour la sauvegarde et la préservation des œuvres laissées par leurs savants. Les deux universitaires soutiennent que les savants répertoriés dans cet ouvrage de 423 pages appartiennent à de grandes familles versées dans l'édition et la traduction, telles les El Bekria, El Tnilania, El Kountia ou encore El Belbalia qui ont sauvé un pan entier de la culture locale. Néanmoins, ils regrettent que plusieurs corpus ont disparu à travers le temps laissant très peu de sources aux historiens et autres chercheurs. « Ledit dictionnaire fait connaître la contribution du Touat dans la science et la civilisation en mettant en valeur l'inestimable legs laissé par ses têtes pensantes », affirme les deux chercheurs non sans reconnaître un certain nombre d'embûches dans leur travail, entre autres l'égarement de nombreux corpus. C'est pourquoi ils appellent les institutions publiques à s'impliquer davantage pour l'insertion et la mise en valeur de l'histoire de la région du Touat.