« C'est lui qui m'a encouragé à embrasser une carrière d'artiste », dit-il. « Souvent, il m'emmenait avec lui pour me produire en avant-première de ses galas ou alors chanter avec lui en duo. J'ai fait avec lui cinq duos. Des moments mémorables. Je frémis rien qu'en me rappelant ces moments », ajoute-t-il. C'était du temps où ceux qui le voyaient seul sur scène ou en duo avec Lounès l'ont surnommé « Petit Matoub ». Ils étaient alors dans le même tempo (voix et style). Passion familiale Faut-il croire que l'amour de l'art muse est un héritage familial ? Hamid Matoub, né à Alger dans le quartier populeux de Djenane Mabrouk, a été bercé par les sonorités du chaâbi joué et chanté par ses oncles paternels Achour, Moh Smaïl qui avait été au banjo avec El Hasnaoui et Moussa qui avait produit des disques et cassettes à la fin des années 70. Son oncle maternel, Lounès Ladjadj, était dans le même milieu. « J'ai été nourri à la sève du chaâbi. J'ai connu ce style à Alger mais aussi en arrivant en Kabylie avec Cheïkh El Hasnaoui, Slimane Azzem. Le chaâbi et la musique kabyle ne sont pas incompatibles. Les grands maîtres du chaâbi sont tous originaires de Kabylie. El Anka, El Ankis, Ezzahi, Mrizek, Zerrouki Allaoua mais aussi de plus jeune comme Messaoudi, Hamidou, Chercham », souligne-t-il.
Nouvel album Hamid Matoub vient de sortir son 12e album en 36 ans de carrière. Le premier fut édité à Paris en 1983 alors qu'il n'avait que 16 ans. Ses débuts sur scène remontent à bien avant. « Vers 14 ans, Lounès m'accordait toujours un moment sur scène lors des fêtes de mariage qu'il animait. » Il ne manquera pas aussi de remercier au passage Chérif Hamani. « Comme Lounès, lui aussi me permettait de chanter lors des fêtes dans la région. » Ces intermèdes lui ont permis de reprendre des chansons de l'un et de l'autre mais aussi des succès d'El Hasnaoui. Le « Petit Matoub » ne cessera dès lors de grandir pour voler de ses propres ailes. « Lounès, qui appréciait ma poésie, et d'autres me poussaient vers une carrière dans le monde de la chanson », dira-t-il. Depuis, il fera douze albums, l'un derrière l'autre. Le dernier, « Tadyant iw » (mon histoire) compte neuf titres. « Je chante en fait mon vécu. Tous les titres ont une histoire personnelle », confie-t-il. Il chante dans une « trilogie » l'amour impossible (Tayri n'temger), le destin (Yura). Il reprendra aussi une chanson avec la musique d'El Badji, « Tadyant nagh » (notre histoire). Il chantera aussi son village où il trouve son inspiration. « C'est un hommage à tous les villages de la Kabylie pour leur beauté mais aussi pour toutes ses femmes et tous ces hommes qui y sont nés », insiste l'artiste. Il évoque aussi le destin d'une de ses sœurs « Wultma » (ma sœur). « J'ai beaucoup d'affection pour elle. Elle a perdu son mari, mort très jeune d'un cancer, laissant derrière lui des enfants, dont l'aîné n'avait que 14 ans. J'ai vu ce qu'elle avait enduré avec un mari malade », dira-t-il. Avant de chanter « Daâwessu » (la malédiction des parents), Hamid Matoub a envoyé un message très fort à ses enfants et tous les autres, les exhortant à aller au bout de leurs études. Pour lui, « Thafath n'tusna » (la lumière du savoir) reste le seul garant pour assurer son avenir. Souvenirs de Lounès Il évoquera aussi les moments intenses et la tristesse qui l'étreint chaque fois qu'il retourne en France où il réside et travaille. « Abrid N'tughalin », décrit l'arrachement. « Je viens par voie maritime et chaque fois, j'ai le cœur déchiré », soupire-t-il. Il avait écrit la chanson dans le bateau lors de sa première traversée au mois d'août 1994. Dans cet album, le chanteur évoque enfin le souvenir de Lounès Matoub, « Azamul ntdukli ». « Depuis sa mort, beaucoup de choses ont changé. Il était le rassembleur d'une identité, d'une nation. Il a toujours cru en une Algérie meilleure. Désormais, le chemin qu'il avait tracé n'est pas suivi mais ses chansons restent », estime Hamid. Hamid Matoub a chanté dans ses 12 albums les thèmes du quotidien. Il est monté sur plusieurs scènes en Algérie (Tizi Ouzou, Bouira), en France (Marseille, Saint-Etienne, Dignes, Paris au Cabaret sauvage et au Zénith lors de l'hommage à Lounès Matoub), au Canada (Montréal), USA (San Francisco) et en Allemagne lors du Festival international de la chanson amazigh. Le chanteur remercie tous ses fans et ceux qui le suivent sur sa page facebook. Il retrouvera son public prochainement lors d'une tournée qui le mènera dans plusieurs villes de France et de Belgique. Il ira aussi à Montréal où son premier passage avait marqué la communauté algérienne.