Le vote des Italiens, hier, sur une réforme constitutionnelle, a provoqué des sueurs froides au niveau de l'Union européenne (UE) et sur les marchés financiers, où l'on redoute, après le choc du Brexit et la montée des mouvements populistes, une nouvelle phase d'ins-tabilité dans la troisième économie de la zone euro. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président américain, Barack Obama, ont ouvertement appelé à voter oui. Le scrutin porte sur une réforme constitutionnelle qui prévoit une réduction drastique des pouvoirs du Sénat, une limitation des prérogatives des régions et la suppression des provinces. Il s'est transformé, en pleine vague populiste, en plébiscite sur le chef du gouvernement (centre-gauche). Matteo Renzi a, en effet, assuré qu'il démissionnerait en cas d'échec. Par ce scrutin, le chef de l'exécutif veut bouleverser le système institutionnel mis en place en Italie le 1er janvier 1948. Le bicamérisme intégral donne aux sénateurs les mêmes pouvoirs qu'aux députés pour légiférer et pour voter la confiance au Premier ministre et à son gouvernement. Il convient, argumente Matteo Renzi, d'y mettre un terme pour asseoir un exécutif renforcé. L'incessante valse politique depuis la Seconde Guerre mondiale plaide en sa faveur : l'Italie a vu défiler 60 gouvernements depuis 1946. Une vaste majorité de la classe politique, de la droite aux populistes du Mouvement 5 Etoiles (M5S) ou de la Ligue du Nord, en passant par tous les extrêmes et même des « frondeurs » du Parti démocrate (PD) de Renzi ont appelé à voter « non » en dénonçant une trop forte concentration des pouvoirs dans les mains du chef du gouvernement. Beppe Grillo, le fondateur du Mouvement 5 Etoiles, a exhorté vendredi les Italiens à voter « avec les tripes » pour défendre leurs libertés et leur indépendance, tout en se lançant dans un intrigant éloge du caractère « poétique » d'une éventuelle défaite. En cas de victoire du non, le M5S devrait réclamer des élections anticipées, mais le président Sergio Mattarella ne devrait pas dissoudre le Parlement avant une réforme de la loi régissant l'élection des députés. La réalité d'un retrait de Renzi en cas d'échec dépendra sans doute de l'ampleur du score. Même s'il présente la démission de son gouvernement, il pourrait en effet rester à la tête du PD, voire même être reconduit à la présidence du conseil. Mais il a répété qu'il ne prendrait jamais la tête d'un gouvernement « technique » chargé uniquement de réformer la loi électorale.