Quelle est la place de la critique cinématographique au Maghreb ? Une question à laquelle des experts algériens, tunisiens, marocains et français tenteront d'y répondre aujourd'hui dans un symposium à Tizi-Ouzou, dans le cadre du festival du film amazigh. Les intervenants auront avant tout à définir le concept de la critique d'art. «Pour moi, la critique cinématographique, ce n'est pas de dire qu'un film est bon ou mauvais mais de faire une lecture du film, de son contenu et aussi de sa forme et de la langue cinématographique utilisée car on ne peut dissocier la forme du contenu», explique Mohamed Sardi, critique de cinéma en Tunisie qui a pris part à cette rencontre. Au Maghreb, estime-t-il, ce concept est ambigu. «En Europe ou aux USA, l'influence de la critique cinématographique sur la carrière d'un film est très importante. La critique influence même le choix public, le poussant jusqu'à aller voir ou à revoir le film. C'est différent au Maghreb. L'influence est insignifiante. Nous avons des journalistes critiques qui donnent plus une approche moraliste du film qu'une véritable critique. Un journaliste en plus, peut casser un film. Sauf peut-être en Egypte, les critiques de cinéma, les vraies, sont rares pour ne pas dire inexistantes», fait-il savoir. En effet, indique-t-il, elles n'ont aucun statut et quand elles ne sont pas des journalistes, elles sont des chercheurs ou des universitaires. Bref, des critiques académiques. «Le pire, c'est que nous n'avons pas d'école spécialisée dans ce domaine. Développer l'esprit critique chez nos élèves n'est pas une culture de chez nous ! Un film pour nous, ce n'est qu'une partie de plaisir. On ne cherche pas plus loin, voir ce qu'il y a derrière », estime-t-il. Par ailleurs, l'objectivité et la subjectivité dans l'art ainsi que le développement ou le non développement du sens critique à la télévision seront abordés dans ce symposium. Il s'agira aussi de déterminer l'impact de la critique, si critique il y a, dans la production du savoir, non seulement au Maghreb mais aussi dans le monde arabe et en Afrique. Enfin, les intervenants auront à souligner le rôle de l'université dans l'organisation du métier de critique d'art. A ce propos, l'expert français, Michel Serceau, avait souligné que «le cinéma a longtemps été ignoré par la recherche universitaire. Et lorsqu'il est entré à l'université, c'est une critique cinématographique très occidentalo-centrée qui a imposé ses hiérarchies et ses films à partir desquels penser le cinéma». A analyser absolument !