« Louange à Allah, le Seigneur des mondes, que les prières et la paix d'Allah soient sur le dernier des prophètes et des messagers et sur sa famille et tous ses compagnons. Honorable assistance, distingués savants, érudits et récitants du Coran, permettez-moi de vous adresser mes salutations chaleureuses et ma profonde considération et de vous dire combien il me plaît de partager avec vous la célébration de cette Semaine nationale du Coran, devenue pour l'Algérie une louable tradition bien établie. Un rendez-vous à peine terminé qu'il est déjà souhaité par les gens du Coran et dont l'attente se fait de plus en plus pressante avec l'avènement du mois de naissance de notre Prophète, que le salut et la paix d'Allah soient sur lui. Un rendez-vous attendu par les familles algériennes de plus en plus nombreuses à espérer voir leurs enfants parmi l'élite des récitants du Coran, surtout depuis que des filles et fils de l'Algérie se sont illustrés sur la scène arabe et islamique en décrochant les premières places dans des concours internationaux dédiés au Coran. L'intérêt des enfants de notre pays ne se limite plus à la récitation et à la psalmodie du Coran mais s'étend à la méditation de ses significations et l'exploration de ses profondeurs. Depuis la précédente édition de la Semaine du Coran, deux livres d'exégèse sont venus renforcer la bibliographie du monde musulman, deux ouvrages de référence, fruit d'un effort algérien, réalisés grâce un soutien total de l'Etat au plan de l'édition et de la distribution. Cette rencontre permet, à chaque fois, à notre élite universitaire, nos érudits et imams d'approfondir la méditation et la réflexion sur le Coran afin d'en tirer les enseignements et les valeurs qui garantissent la pérennité de la nation et exhortent à une vie digne dans le cadre de la morale et de la vertu. C'est une occasion également pour exposer leurs conclusions et les résultats de leurs recherches dans le cadre d'une rencontre scientifique. Vous avez opté, judicieusement pour un thème qui met en évidence la valeur de la modération dans le Coran. L'examen de ce sujet intervient à un moment où notre pays et notre nation musulmane sont confrontés à des défis majeurs dont celui de la préservation de l'identité nationale dans un monde globalisé. Un monde où les idées, ne reconnaissant plus aucune frontière, transpercent les espaces pour impacter les mentalités, altérer les comportements et les habitudes de la société et entraîner autant d'amateurs dans une spirale d'identités de rechange et d'appartenances nouvelles du fait d'une aliénation d'esprit exercée par certains laboratoires d'idées. La nation musulmane qu'Allah a élue pour être témoin aux gens est, à juste titre, digne de cette caractéristique singulière de par ses valeurs intrinsèques de modération et du juste milieu et ses efforts pour se prémunir contre les excès, les abus et le fanatisme, d'une part et contre tout manquement ou délaissement, d'une autre part. Cette distinction divine confirme que la Oumma musulmane est une nation de justice et d'équité, de sincérité et de vertu, une nation élevée au statut de témoin aux gens. Allah a dit : « C'est ainsi que nous avons fait de vous une communauté du juste milieu afin que vous soyez témoins aux gens et que le Prophète vous soit témoin » (Al-Baqara/143). C'est pour nous Algériens, une fierté et une responsabilité humaine que d'appartenir de cette Oumma témoin qui est avec toutes ses composantes au service de l'humanité. Chaque avis et chaque position qui en émanent sont frappés du sceau de la modération et toutes ses actions se conforment au principe du juste milieu. A ce titre, nous devons rester scrupuleusement attachés à cette valeur civilisationnelle. Il nous incombe, par conséquent, de ne laisser passer aucune opportunité de contribuer à l'équilibre des positions dans le monde, que l'agitation de notre réalité ne nous détourne pas de l'influence stratégique dans les relations humaines. Notre nation a une conscience innée — une conscience de raison et de sagesse — que le renoncement au juste milieu implique la perte de cette caractéristique singulière et du statut de témoin et c'est parce que nous veillons dans nos positions à nous éloigner des postures extrêmes que cette valeur est restée à travers les siècles ancrée dans nos esprits, traditions et coutumes, dans notre comportement et dans nos croyances. La modération est la caractéristique singulière de notre sainte religion dans ses moindres détails. Le Coran en a énoncé les principes et la Sunna du Prophète, que le Salut d'Allah soit sur lui (QSSL), en a tracé la voie suivie par nos ancêtres qui en ont fait très bonne observance aussi bien dans la pratique de leur foi que dans leur vie courante. Le Coran est révélé pour conduire l'Homme à la félicité et non point pour le peiner et faire son infortune. Allah Tout-Puissant dit : « Tâ Hâ, nous ne t'avons pas révélé le Coran pour te rendre malheureux mais comme un rappel pour quiconque craint Dieu » (Tâ Hâ 1-3) Le Prophète (QSSL) n'est pas envoyé imposer aux gens des pratiques pénibles. « Et nous ne t'avons envoyé que miséricorde » (El Anbiyâ 107) et le Messager d'Allah lui-même rend grâce au Tout-Puissant de cette vertu dont Il l'a gratifié : « Allah ne m'a pas envoyé pour rendre la vie difficile aux gens ni pour souhaiter leur perte, Il m'a plutôt envoyé comme enseignant pour faciliter la vie aux gens. » Le Coran énonce les principes fondamentaux de la modération et de la guidance en stipulant clairement : « Dieu veut pour vous la facilité. Il ne veut pas pour vous la difficulté » (Al Baqara 185) et « Dieu veut alléger votre fardeau car l'homme a été créé faible » (Al Nissâ, 28). Le verset 78 de la sourate El Hadj rappelle que « c'est Lui qui vous a élus sans vous imposer un fardeau dans la religion, la Tradition de votre père Ibrahim, c'est lui qui vous a dénommés Musulmans ». Dans la sourate Al Talaq en son verset 7, est illustrée la miséricorde d'Allah envers ses créatures : « Dieu n'impose rien à une âme qui ne soit en proportion de ce qu'Il lui a donné. Dieu fera qu'à une difficulté succède une facilité », ou encore dans ce verset « ...mais si quelqu'un est contraint d'en manger sans pour autant être rebelle ou transgresseur, nul péché ne lui sera imputé » (Al Baqara 173) et dans « Dieu ne veut pas vous imposer une trop lourde charge mais il veut vous purifier et parachever Sa Grâce sur vous. Puissiez vous être reconnaissants » (Al Mâidah, 7). Dans la Sunna du Sceau des prophètes, les Hadiths sont sans équivoque : le signe distinctif de l'Islam est la modération et la facilité qui se traduit par l'éloignement de tout esprit d'exagération, de toute pratique bornée de la dévotion et de tout comportement fanatique. Notre mère Aïsha rapporte ces propos du Prophète (QSSL) : « Ô gens, n'entreprenez que les choses à la mesure de vos capacités, Allah ne se lasse point et vous vous lassez et les actions les plus aimées par Allah sont celles qui durent dans le temps même si elles sont minimes. » Aïsha Oum El Mouminine disait également : « On n'a jamais donné à l'Envoyé d'Allah à choisir entre deux choses sans qu'il n'optât pour la plus facile tant qu'il ne s'agissait pas d'un péché. S'il s'agissait d'un péché, il restait, de tous les hommes, celui qui en fut le plus éloigné. » La tradition de notre Prophète regorge d'exemples éloquents de cette inclination à bannir l'exagération et l'excès dans la pratique de la religion. D'après Ibn Abbas, que Dieu le bénisse, le Prophète disait : « Prenez garde à l'exagération dans la religion, car certes ce qui a perdu ceux qui sont venus avant vous est l'exagération dans la religion ». Ibn Mas'ud rapporte pour sa part que le Prophète avertissait : « Malheur aux rigoristes, et il le répéta trois fois. » Dans son souci de prémunir sa nation contre les méfaits des excès et du rigorisme, notre Prophète a recommandé aux musulmans de demeurer attachés à la voie médiane et de ne pas s'imposer des choses qu'ils ne pouvaient eux-mêmes supporter car elles étaient incompatibles avec la nature humaine, de ne point s'assujettir au monachisme qui « ne leur a été nullement prescrit » car ceux qui l'avaient fait auparavant sont restés claustrés dans leur maison et leur monastère et ont failli à leurs obligations essentielles. Pour concrétiser cet équilibre nécessaire entre la facilité et la difficulté, le Prophète (QSSL) a mis en garde contre les conséquences dévastatrices de l'excès pour la quiétude et la sérénité de l'Etre. Abi Huraira rapporte ce Hadith : « Cette religion est facilité, celui qui va la durcir (et chercher la difficulté) sera vaincu. » Tous ces textes sont l'illustration parfaite de la voie médiane et de modération prônée par l'Islam. Ils sont la preuve tangible que l'Islam est religion de mansuétude et de souplesse, une religion venue apporter la facilité et dont aucune des prescriptions n'implique contrainte et difficulté. L'Islam bannit le rigorisme dans la pratique de la foi, rejette l'extrémisme et s'élève contre toute forme de durcissement dans l'observance de ses recommandations. C'est une religion de justice, de clémence et de miséricorde qui tient compte des aptitudes des gens, de leur nature, voire de leur âge. Telle est l'expression la plus manifeste de la modération dans son aspect humaniste. Le concept de modération transparaît dans l'analytique des règles de la Charia islamique à travers les aspects d'allégement sur l'obligatoire en prenant en considération l'être faible, et du libre arbitre dans les charges. Aussi, ne trouverons-nous pas de règle dans la Charia ou dans la pratique de l'Islam qui ne soit pas imprégnée de cette valeur et du principe de simplification. Une spécificité qui se reflétera dans le comportement des individus et des collectivités au sein de cette nation, inspirera leur mode de vie, instruira leur morale et imprimera leur culture et leurs valeurs, car l'appel à la modération se veut une orientation vers la cessation de l'abjuration, de l'acte extrémiste et de toute tendance au sentiment de reclus, l'Islam préconisant effectivement d'insuffler les vertus de cet esprit dans toute conduite. Les versets du Saint Coran préconisent, en outre, de mener une vie digne sans prodigalité et sans avarice. Dieu, le Tout-Puissant, dit : « Et recherche à travers ce qu'Allah t'a donné, la Demeure dernière. Et n'oublie pas ta part en cette vie. Et sois bienfaisant comme Allah a été bienfaisant envers toi ». (El Qasas 77). Il dit aussi : « Qui, lorsqu'ils dépensent, ne sont ni prodigues ni avares mais se tiennent au juste milieu » (El Furqane, 67). Dans un autre verset, Il dit également : « Ne porte pas ta main enchaînée à ton cou (par avarice), et ne l'étend pas non plus trop largement, sinon tu te trouveras blâmé et chagriné, (El Israa 29). Mesdames et Messieurs, L'Algérie, qui a adopté la modération dans la gestion de ses affaires et s'inspire de cette valeur dans sa démarche et sa culture, est appelée aujourd'hui à être une nation témoin au monde. Son parcours riche en positions mesurées et modérées depuis qu'elle a choisi, et par conviction, l'Islam comme religion, et s'en abreuve de sa source pure et saine de tout excès et abus, protège aujourd'hui notre société de tous ces tiraillements régionaux et internationaux. L'Algérie de Abderrahmane Ethaalibi, de Chérif Tlemceni, d'Abi Abdallah Etenessi, Abi Mediene Chouaib, de Mohamed Ben Abderrahmane El Azhari, Abdelhaq El Ichbili, Abi Zaid Abderrahmane El Ouaghlisi, d'El Boussairi, d'Abi El Fadhl El Mechdali, d'Ahmad Ettifachi et bien d'autres que Dieu les bénisse, a aussi engendré l'Emir Abdelkader, Cheikh El Haddad, Cheikh Bouamama, Cheikh Abdelhamid Ben Baddis, Mohamed El Bachir El Ibrahimi, Larbi Tbessi, Cheikh Bayoudh, Abi El Yaqadhane mais également les martyrs Mustapha Benboulaïd, Si El Haoues, Amirouche, Didouche Mourad, Badji Mokhtar, Larbi Ben M'hidi, Colonel Lotfi, Zighout Youcef, Malika Gaïd, Ourida Meddad, Hassiba Ben Bouali et Fadhéla Saâdane que Dieu leur accorde Sa Sainte Miséricorde. C'est de cette Algérie dont a hérité cette génération qui se revendique de cette appartenance et qui fait de cet esprit de modération un support authentique. Cette génération n'hésitera pas, de ce fait, à plébisciter la Charte de la paix et de la réconciliation nationale et à rendre possible sa concrétisation et sa consécration en adhérant à tous les projets de l'Etat visant à éradiquer les causes du fondamentalisme, de l'extrémisme et du rigorisme. De la matrice de notre référence historique et culturelle imbue des enseignements de l'Islam modéré et des valeurs de patriotisme et de sacrifice, est née l'école « Algérie » de prévention contre l'extrémisme, qui accapare l'attention de tous les concernés, et dont l'expérience attire les sages, inspire les amis et cultive la fierté et la confiance en soi au sein de la société. Mesdames et Messieurs, Notre pays est resté, au fil des années, attaché à son patrimoine civilisationnel. Son capital en matière de culture et de sciences dont il s'enorgueillit aujourd'hui en est témoin et se veut un fort argument pour faire face aux défis du monde actuel, un monde en proie à des perturbations troublantes et impressionnantes et qui répercute une réalité préoccupante qui menace l'existence même de l'humanité. Nous assistons au déclin de la culture de l'acceptation de l'autre et du principe de coexistence pacifique, et constatons la montée de la xénophobie qui se substitue au sentiment de concorde et d'amour, des valeurs qui se retirent de toutes les contrées du monde d'aujourd'hui, ce qui suscite l'inquiétude et exige une coopération véritable pour éradiquer toutes les formes d'extrémisme, les aspects du fanatisme et les causes de la haine et de la rancœur et d'œuvrer à mettre nos sociétés à l'abri des conflits sectaires et des dérapages dogmatiques. Notre religion étant une responsabilité dans la pratique de la foi et dans la gestion des affaires courantes, je vous exhorte savants et avant-gardistes de la Oumma musulmane à œuvrer à la défense de l'Islam qui est aujourd'hui intentionnellement et injustement visé par certains milieux hostiles, au sein de sociétés qui ont peu de connaissances sur cette sainte religion. Ce message de modération est la meilleure illustration de la noblesse de l'Islam et de son rejet de toute forme de violence et de fanatisme y compris l'effusion de sang et tous les crimes terroristes. Notre Nation est aujourd'hui interpellée face à ce défi, un défi majeur pour la défense de notre religion et la préservation de l'humanité tout entière des conflits de religions et de confessions qui sont des conflits très dangereux. Mesdames et messieurs, Outre la préservation de l'image de l'Islam dans le monde, les enfants de notre nation ont, partant de nos références spirituelles et de nos concepts humanistes, la responsabilité et le devoir de préserver l'intégrité physique. Ce devoir nous incombe d'œuvrer pour la promotion de la Rahma (clémence) et de l'unité et pour le rejet de la violence et de toute instrumentalisation de notre religion afin de perpétrer ces crimes odieux et ourdir ces vils complots. L'effusion de sang des musulmans est un fait quotidien dans toutes les régions de notre nation arabo-musulmane. Pourtant, Allah Tout-Puissant proscrit l'effusion de sang qui est un péché capital et un crime majeur. Elle est le principal acte pour lequel l'Homme est comptable devant Dieu le Jour du Jugement. Des vies innocentes sont aujourd'hui ravies en Libye, pays frère et voisin, au Yémen, en Syrie, en Irak et dans bien d'autres territoires du monde arabo-musulman. Devant cette tragédie, c'est à nous musulmans qu'il incombe, en premier lieu, d'intensifier les initiatives et de multiplier les actions politiques et diplomatiques pour trouver un règlement à ces conflits. Nous sommes tenus, en tant que musulmans, de nous référer aux préceptes de notre religion et de porter haut son noble message pour contribuer à la paix des cœurs et la quiétude des esprits, à la consécration de la paix, de la sécurité, de la justice et de l'équité pour le règlement des problèmes et la concrétisation de l'unité des enfants d'une même nation unie par le Coran. Mesdames et messieurs, Le thème de la modération est un choix judicieux et j'ai déjà souligné que l'Algérie est en droit de s'enorgueillir de la modération de ses références religieuses et de sa politique même dans les épreuves. Je voudrais vous exhorter, enfants de mon pays, érudits et hommes de religion, à orienter votre savoir, vos efforts et vos actions dans le sens d'une mobilisation de la part de notre vaillant peuple pour un saut national face à la crise financière mondiale et ses répercussions. Un saut qui nous permettra d'être au diapason des nations développées et nous le pouvons grâce aux potentialités que recèle notre pays et aux glorieux exploits de nos ancêtres dans le domaine des sciences et de la civilisation, un objectif que nous devons atteindre pour honorer nos traditions de sacrifice et de dévouement au service de l'Algérie. Mesdames et messieurs, En saluant vos efforts pour la perpétuation des valeurs et principes du juste milieu au sein de nos zaouïas, instituts scientifiques et établissements religieux, nous mettons en évidence l'impératif de mener des études qui permettent de mettre en pratique cette modération afin qu'elle nourrisse le sens nationaliste de manière à répandre ces idéaux parmi nos enfants et leur donner forme dans leur pensée, parole et action. Plein succès à vos travaux qui, nous le souhaitons, dégageront des résultats à la hauteur de nos aspirations et celles de notre région et des projets qui contribueront à parfaire la pratique de notre religion et à corriger l'image ternie que d'aucuns veulent attribuer à l'Islam.