Du statut de présidentiable à celui d'accusé : le coup de sort qui a frappé Dominique Strauss-Kahn (DSK) a mis sens dessus dessous son parti d'adoption éclaboussé par les miasmes d'un scandale que personne n'a pu voir venir, une opinion ébranlée par le basculement d'une affaire à rebondissements incessants, et une république à fondations des plus incertaines. «Seul un scénariste d'Hollywood aurait pu imaginer un tel scénario», a commenté le centriste François Bayrou. L'attentat politico-médiatique, favorisé par une justice américaine roulée dans la farine par une plaignante reconnue dans le tard peu crédible, a déteint sur l'image du favori des sondages, embarqué manu militari. L'alternative à gauche, confortée par la vague rose du socialisme triomphant, a pris un coup de vieux dans cette France du délitement à droite et rattrapée par le syndrome lepéniste encore une fois au seuil de la république. La théorie du complot aide, certes, à minimiser les dégâts de la déroute et procède à la réhabilitation morale de l'ex-futur patron de l'Elysée. Mais le mal est fait. Le divorce entre la France de gauche et l'électorat paraît trop souffrir du profond décalage entre la vie princière du présidentiable et la réalité d'un quotidien pas facile à vivre en ces temps de crise économique et sociale. DSK hors coup ? Une hypothèse que tous les observateurs et les médias s'accordent à reconnaître en fait incontournable. «Cette affaire lui a forgé une image de richissime bourgeois machiste, qui ne peut que le couper d'une partie de l'électorat populaire de la gauche et ne lui permet plus de mordre dans l'électorat centriste et féminin», analyse le quotidien régional l'Alsace. L'espoir est toujours permis au parti socialiste qui entend capitaliser l'enfer de Rikers Island de la relance à la course à l'Elysée d'un candidat déterminé à aller jusqu'au bout de ses ambitions et à «manger le monde», selon l'expression de Julien Dray. Il faudra, pour ce faire, la légitimité d'un blanchiment judiciaire, suspendue à la décision de la prochaine session du tribunal de New York du 18 juillet, mais, aussi, du report de la date limite des candidatures aux primaires socialistes fixée au 13 juillet. Le happy end du feuilleton de mauvais goût est fort de ces incertitudes qui mettent l'Elysée dans la balance new-yorkaise et le couperet des sondages. Les Français restent divisés sur la possibilité d'un retour voulu par 49% des personnes sondées, selon une enquête de Harris interactive, et rejeté par 45% d'entre eux. C'est, à titre de précision, dans la proportion des sympathisants du PS que l'on trouve les partisans du come back de ce qui fut l'éminence grise du FMI. Il reste, alors, le rôle honorifique de «faiseur de roi», jugé réaliste par le politologue Frédéric Dabi de l'Ifop. Le pacte DSK-Aubry pourrait être activé. «Si DSK soutenait Martine Aubry, cela pourrait avoir un résultat ambivalent, lui donner une légitimité, mais aussi accréditer l'idée qu'elle est une candidate de substitution», analyse Stéphane Rozés (Cap). Quelle issue à l'embrouillamini socialiste ?