Procès historique pour l'Egypte et le monde arabe. Hosni Moubarak, 83 ans, a comparu, hier, devant la justice. Il est le premier chef d'Etat arabe à le faire depuis le début de la contestation qui a secoué la région. Début juillet, le président Ben Ali a été condamné par contumace à 15 ans de prison pour possession de drogue et d'armes. Six mois après avoir dégagé le pouvoir, Moubarak apparaît publiquement pour la première fois depuis sa démission le 11 février dernier sous la pression militaire après 29 ans au pouvoir. Couché sur une civière, dans un box grillagé et muni de barreaux noirs, il est jugé pour meurtres, corruption et dilapidation de fonds publics par le tribunal pénal du Caire qui a élu domicile pour des raisons de sécurité dans un amphithéâtre de l'Académie de police. « Je rejette catégoriquement toutes les accusations. Je n'en suis pas responsable », déclare Moubarak à Ahmed Refaat, le président du tribunal qui l'a accusé de s'être mis d'accord avec Habib el-Adli, son ministre de l'Intérieur, pour le meurtre « prémédité » de quelque 840 manifestants qui protestaient pacifiquement contre la détérioration de leurs conditions de vie, dans plusieurs gouvernorats d'Egypte lors des 18 jours du soulèvement populaire de janvier-février. Ses avocats ont fait état de vices de procédures. Pour eux, ce procès diffusé en direct à la Télévision, ne devrait pas avoir lieu. Ils veulent entendre comme témoins, à la reprise de ce procès prévue le 15 de ce mois, 1.600 personnes, dont le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, l'ex-ministre de la Défense et présentement chef du Conseil suprême des forces armées, le général Omar Souleimane, l'ancien chef des services de renseignements, le gouverneur et l'ex-gouverneur de la région du Sud-Sinaï. Moubarak, qui restera jusqu'à la prochaine audience dans un hôpital près du Caire où il sera suivi par un cancérologue « à chaque fois qu'il en aura besoin », n'était pas seul dans le box des accusés. Il a comparu aux côtés d'Alaa et Gamal, ses deux fils, Habib el-Adli et six hauts responsables de la police. Hussein Salem, un homme d'affaires proche des Moubarak et actuellement en cavale en Espagne, sera jugé par contumace. Comme attendu, les deux fils ont réfuté les faits qui leur sont reprochés. « Je nie », disent tour à tour Alaa et Gamal avec une oreille rivée sur les accrochages qui ont lieu hier matin devant l'Académie de police entre les pro et les anti-Moubarak. Si les enfants de Moubarak doivent revenir devant le juge avec leur père, l'ex-ministre de l'Intérieur et les six responsables retourneront ce matin. Ils risquent la peine de mort s'ils sont reconnus coupables.