L'islam ayant connu une grande expansion après la mort du Prophète (QSSSL), beaucoup de nouveaux convertis à l'Islam d'origine non arabe, dits «âjm», se sont trouvés dans l'incapacité de lire ou de comprendre le Coran avec l'aisance des arabes de souche, qui comprenaient autant les subtilités des versets coraniques que celles des sentences prophétiques par instinct linguistique. Les sciences de la religion ont alors connu, et dès le premier siècle de l'Hégire, une véritable révolution donnant, en parallèle, naissance à une multitude de disciplines dans divers domaines. Hier, nous avons abordé la deuxième vocation majeure de la Révélation qui est la préservation de la vie. Et quand on connaît l'intérêt et l'importance qu'accorde l'Islam à la vie, il est tout à fait légitime de se poser la question suivante : si l'Islam accorde autant de respect à la vie, pourquoi donne-t-il, d'un autre côté, autant d'importance au djihad, qui est synonyme de guerre sainte en Islam ? Tout d'abord, le mot djihad, qui signifie effort en langue arabe, n'est pas forcément synonyme de combat, utiliser sa fortune dans des œuvres de bienfaisance est une forme de djihad ; d'ailleurs, le djihad avec les biens précède le djihad qui signifie combat à neuf reprises dans le Coran, notamment dans Sourate El Anfal 8/72. E'tawbah 9/20, 41, 44, 88 et 81. El Hudjurate 49/15 ; E'çaf 61/11. Résister à la tentation est une forme de djihad comme le rapporte un hadith de Tirmidhi d'après Fodhala Ibn Abid (DAS). Faire preuve de piété filiale (bir el waldine) est une forme de djihad qui a plus d'importance que le combat. Boukhari et Muslim raportent d'après Abdullah Ibn 'Amr Ibn Al 'As (DAS) qu'un homme vint au Messager de Dieu (QSSSL) lui demander l'autorisation d'aller au djihad (combat). Il lui dit : «As-tu l'un de tes deux parents encore en vie ?» Il dit : «Oui, les deux même». II dit : «Retourne auprès de tes parents et tiens-leur bonne compagnie ! (Tel est ton djihad).» En outre, veiller à ce qu'une veuve et ses orphelins ne manquent de rien, accomplir le pèlerinage pour une femme ou une personne âgée, se mettre en quête du savoir sont autant de formes de djihad comme le rapportent bon nombre de hadiths. Concernant le combat, le Coran nous le présente comme une mesure extrême que la nature humaine n'apprécie guère. Dieu dit dans Sourate El Baqara (216) : «Le combat vous a été prescrit alors qu'il vous est désagréable.» Et c'est pour cette raison, et conformément à la nature humaine qui est censée pencher beaucoup plus pour la paix que pour la guerre que le Messager de Dieu (QSSSL) a dit, selon ce que rapportent Boukhari et Muslim d'après Abou Hourayra (DAS) : «Ne souhaitez pas de rencontrer l'ennemi, mais une fois que vous l'aurez rencontré, montrez-vous patients.» D'autre part, l'Islam nous commande d'être pacifistes envers ceux qui le sont à notre égard, même s'ils ne partagent pas nos convictions. Dieu dit dans Sourate El Mumtahana : «Dieu ne vous défend pas d'être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Dieu aime les équitables. Dieu vous défend seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. Et ceux qui les prennent pour alliés sont les injustes.» Et même si la guerre nous est imposée, nous ne devons pas dévier des valeurs qu'enseigne l'Islam. Il est dit dans Sourate El Mayda : «Ô croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Dieu et (soyez) des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injuste. Pratiquez l'équité : cela est plus proche de la piété. Et craignez Dieu. Car Dieu est certes parfaitement Connaisseur de ce que vous faites.» Les premiers musulmans ont su faire preuve d'humanisme même dans l'adversité. L'historienne britannique, Karen Armstrong, ancienne nonne et célèbre experte en histoire d'Orient, écrit dans son livre «La guerre sainte» qui traite de l'histoire des trois grandes religions : Le mot Islam vient de la même racine arabe que le mot la paix, et le Coran réprouve la guerre comme un événement anormal contraire à la volonté de Dieu. «Toutes les fois qu'ils allument un feu pour la guerre, Allah l'éteint. Et ils s'efforcent de semer le désordre sur la terre, alors qu'Allah n'aime pas les semeurs de désordre.» (Le Coran, sourate al-Ma'ida, verset 64). L'Islam ne justifie pas la guerre ou l'extermination agressive, comme la Torah fait dans les cinq premiers livres de la Bible. Religion plus réaliste que le christianisme, l'Islam déclare que la guerre est inévitable et parfois une obligation positive pour mettre fin aux oppressions et à la souffrance. Le Coran enseigne que la guerre doit être limitée et conduite de la façon la plus humaine possible. Mohammed (QSSSL) a dû combattre non seulement les habitants de la Mecque mais également les tribus juives de la région et des tribus chrétiennes en Syrie qui, alliées aux juifs, planifiaient une attaque contre lui. Pourtant, ceci n'a pas poussé Mohammed à dénoncer les gens du Livre. Ses musulmans ont été forcés de se défendre mais ils n'ont pas livré une guerre sainte contre la religion de leurs ennemis. Quand Mohammed a envoyé Zaid contre les chrétiens à la tête d'une armée musulmane, il leur a dit de combattre pour la cause de Dieu bravement mais d'une manière humaine. Ils ne devaient pas molester les prêtres, ni les moines, ni les nonnes, ni les personnes faibles et impuissantes qui ne pouvaient pas combattre. Il ne devait y avoir aucun massacre des civils. Les musulmans ne devaient abattre aucun arbre ni démolir un seul bâtiment. C'était très différent des guerres de Josué. (1) (1) Karen Armstrong, «Holy War» (La guerre sainte), Mac Millian London Limited, 1988, p. 25