Ce n'est pas seulement le centre-ville qui a connu une telle ambiance, toutes les communes de la wilaya ont, elles aussi, vu leurs artères animées. La ville des Ponts n'a pas connu des soirées aussi animées que celles vécues en cette deuxième quinzaine du Ramadhan. Là où se concentrent les boutiques de lingerie, de cafétérias et de crèmeries, il y a foule. Il faut dire que cette année, en raison de la canicule, les familles préfèrent sortir le soir que le jour, un rituel rendu possible aussi grâce à la disponibilité des moyens de transport (bus et taxis) et à la présence policière intensifiée tout au long de ce mois sacré. Et ce n'est pas seulement le centre-ville qui a connu une telle ambiance, toutes les communes de la wilaya ont, elles aussi, vu leurs artères animées. Les plus nostalgiques se rappelleront qu'à une certaine époque les rues de la ville grouillaient de monde la nuit, particulièrement l'été, alors l'effervescence de ce mois d'août durera-t-elle encore ou au contraire s'estompera-t-elle au lendemain de l'Aïd ? Nul doute que la vie reprendra son cours d'ici quelques jours, et les soirées seront moins animées pour ne pas dire mortes. Mais qu'importe, les familles, qui d'habitude ne sortent que rarement le soir dans une ville qui dort à 18 h, ont dû apprécier la balade de l'après-f'tour, d'autres ont eu l'occasion d'assister aux soirées musicales ou théâtrales programmées par la wilaya. «C'est une bonne chose que de voir des familles qui veillent jusqu'à 1 h du matin, je ne me souviens pas avoir vu cela depuis les années 1980. Pourquoi alors attendre le mois de Ramadhan pour que cela soit possible, Constantine est une grande ville, elle a des atouts et je ne comprends pas pourquoi ces gens refusent de sortir le soir, surtout durant l'été», nous explique un père de famille. Son ami, quant à lui, semblait trouver les réponses à tout cela. «Si les commerçants décident d'ouvrir leurs boutiques le soir, les familles viendront. Mais il faut aussi que les autorités s'impliquent en assurant le transport et la sécurité ou en créant des lieux de loisirs pour les familles. Ces espaces existent déjà, il suffit de les rénover, comme cela a été fait avec l'aménagement de l'esplanade de la Brèche avec ses cafés.» Une effervescence vécue également dans les mosquées de la ville, les prières des tarawih sont un moment de piété mais aussi de rencontres entre les fidèles. Rencontré à la sortie de la mosquée El Istiklal du centre-ville, un sexagénaire nous confie l'ambiance de ce mois sacré : «C'est assez spécial ces derniers jours. Nous venons en famille pour faire la prière, puis nous rendons visite à des proches. C'est vraiment l'unique occasion de l'année pour sortir le soir sans craindre quoi que ce soit.» Bien évidemment, les ménages sont préoccupés ces derniers jours par l'achat des vêtements de l'Aïd, une autre corvée pour les parents, mais avant cela ce sont les boulangers qui sont pris d'assaut par les citoyens pour la préparation et la commande des gâteaux traditionnels. En effet, devenu un rite depuis des décennies, les femmes, qui confectionnent les gâteaux, préfèrent la cuisson des fours des boulangeries. La demande est telle qu'il est presque impossible de trouver du pain ou des brioches. D'ailleurs, de longues queues se forment chaque matin devant les boulangeries et une pénurie n'est pas à écarter pour les jours de l'Aïd El Fitr. Car en dépit des notes de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) adressées aux gérants des magasins d'alimentation générale, des vendeurs de fruits et légumes, les gérants de stations-service mais surtout les boulangers afin d'éviter les pénuries des années précédentes, il faut s'attendre au pire vu les considérations de certains. Dans une déclaration faite dernièrement à la radio locale, le secrétaire général du bureau de wilaya de l'UGCAA avoue son impuissance à vouloir imposer les instructions (émanant notamment du ministère du Commerce) aux boulangers car, explique-t-il, «la majorité des ouvriers boulangers sont issus de la région de Jijel, et ils partent chez eux la veille de l'Aïd pour passer la fête en famille, ce qui oblige les patrons à baisser les rideaux.»