Le social et l'économique sont dans un rapport de vases communicants, car la vitalité de l'un repose sur le dynamisme de l'autre et vice versa. Entre autres moyens que la société puise aux activités économiques, ses ressources budgétaires qu'elle constitue grâce à la fiscalité. Si la société fournit à l'économie sa force vive, ses compétences, ses créneaux d'investissement, ses marchés, ses consommateurs, bref, sa raison d'être, elle attend de l'économie qu'elle lui procure, en partage, les ressources financières qui lui permettent de vivre, et par la même, de donner à l'économie, à travers la consommation quotidienne des biens et des services, la capacité de se renouveler et de croître. C'est la loi de ce qui s'est constitué depuis des siècles comme fiscalité que les relais spécialisés de l'Etat se chargent de récupérer afin de déterminer, à chaque fois pour l'exercice futur, la situation du Trésor public ainsi que l'envergure du budget à venir de l'Etat et ses différents démembrements. C'est dire que la fiscalité, pour son caractère vital, est une raison d'Etat et donc une question trop sérieuse pour ne pas être envisagée, en Algérie, sous sa manifestation problématique, autrement dit à travers l'ampleur du phénomène de la fraude fiscale. Dans les moments primordiaux de démarrage économique, l'Etat peut légiférer en préconisant, pour des secteurs entiers, des allègements fiscaux, pour d'autres des exonérations, ou encore des dégrèvements circonstanciés, au demeurant justifiables. Cela a souvent le mérite, en des périodes propices, de favoriser la relance économique et les investissements. Mais l'évasion fiscale, c'est tout autre chose. C'est une gangrène qui soustrait des acteurs économiques indélicats à un devoir primordial, celui de contribuer à l'effort budgétaire, tout en leur permettant un enrichissement facile et une capacité déloyale de concurrencer des opérateurs économiques qui ont opté pour la légalité et la transparence dans la gestion de leur devoir fiscal. En plus de ces effets économiques pervers et du préjudice porté au Trésor public, autrement dit à tous les Algériens, l'évadé fiscal fausse la visibilité statistique en matière économique et commerciale, et nourrit, par la force des choses, l'activité informelle. Et à considérer l'ampleur du phénomène et le manque à gagner pour les finances publiques, l'institution des impôts mériterait de devenir une véritable machine anti-fraude, avec le nombre adéquat d'effectifs pour couvrir l'ensemble des activités et des moyens conséquents dignes d'une industrie. Après tout, l'investissement est sûr de sa rentabilité et n'est qu'une goutte d'eau en comparaison avec le manque à gagner qui se compte en centaines de milliards de dinars qui mériteraient d'aller renforcer les institutions qui soutiennent la détresse sociale de centaines de milliers d'Algériens.