Les Libanais se retrouveront aujourd'hui à la place des Martyrs, au centre-ville de Beyrouth, pour saluer la mémoire de Rafic Hariri et réclamer la vérité sur l'assassinat, le 14 février 2005, de l'ancien Premier ministre et de ses 22 compagnons. Cinq après ce carnage provoqué par une énorme déflagration déclenchée lors du passage du cortège officiel de Hariri, le pays du Cèdre a connu depuis une révolte contre trente ans de présence syrienne, des dizaines d'attentats, une guerre contre Israël en été 2006, une semaine de « mini guerre civile » en 2008 et une désignation en 2009 par l'Onu d'un Tribunal spécial pour juger les auteurs du meurtre de Hariri. Aujourd'hui, il est dans une tourmente régionale. Depuis quelques jours, Israël ne cesse de multiplier les mises en garde belliqueuses au Hezbollah et au Liban. Ces menaces domineront probablement les discours du Premier ministre Saad Hariri, de l'ancien président Amine Gemayel, de l'ex-Premier ministre Fouad Siniora et du chef du comité exécutif des Forces libanaises, Samir Geagea. Ces responsables qui interviendront ce matin devant la foule, tenteront chacun à sa façon de donner les apparences d'unité de la «révolution du Cèdre». Comme lors des quatre précédentes commémorations, ils jureront de ne faire aucun compromis sur le Tribunal international et qu'ils ne cesseront pas une minute de réclamer «la vérité» sur l'assassinat de l'homme qui, en versant son sang, a unifié les chrétiens et les musulmans et déclenché la révolution du Cèdre. Le fils dira qu'il suit le chemin tracé par son père. C'est-à-dire qu'il n'a pas abandonné les constantes et les objectifs du 14 Mars, qu'il œuvre avec son gouvernement pour un État unique, fondé sur l'accord de Taëf, réconcilié avec le monde arabe, l'Occident et le droit international en mettant en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité. «Nous devons aboutir à une unité nationale», dit-il dans un communiqué appelant à une présence massive à la place des Martyrs. Beaucoup de Libanais, y compris ceux de la majorité, pourraient bouder. S'en tenant au premier rapport de la commission d'enquête indépendante mise sur pied par l'ONU qui avait conclu à des «preuves convergentes» impliquant les services de renseignement syriens et libanais, ils soupçonnent le gouvernement qui a repris langue avec Damas de vouloir tourner la page de l'assassinat. Pour eux, tout le monde sait qui a tué Rafic Hariri et pourquoi. Barack Obama qui a envoyé un nouvel ambassadeur ce week-end à Damas, le premier depuis le rappel de son prédécesseur dans la foulée de l'assassinat de l'ancien Premier ministre Hariri, souhaite que justice soit faite aux auteurs de l'assassinat du père du Premier ministre libanais. Comme Saad Hariri et Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies, le président américain soutient les travaux du tribunal spécial pour le Liban. Un tribunal qui aurait selon Ralph Riachy, son vice-président réalisé des «progrès» pour la prochaine phase de l'enquête. Progrès que M. Cassese relativise quand il précise que «toutes les affaires de terrorisme sont beaucoup plus compliquées que les affaires de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide». «Dans le cadre du crime terroriste, on a affaire à des cellules secrètes. Il n'y a pas la chaîne de commandement, de hiérarchie. La plupart du temps, les membres des groupes terroristes ne sont pas prêts à passer aux aveux car ils risquent d'être tués par leurs compagnons», explique celui qui fut le premier président du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) à La Haye.