« Le terrorisme, la communication et l'élite ». Cette triple équation à multiples facettes a été au centre de la conférence-débat animée, hier, par M. Ahmed Adimi, maître de conférence, docteur en sciences de l'information et de la communication, au centre des études stratégiques du journal Echaab. Cette conférence-débat marquée par la présence de M. Azzedine Mihoubi, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre chargé de la Communication, a traité du rôle des médias dans la lutte antiterroriste. L'Algérie a fort heureusement réussi à combattre le terrorisme, certes, mais qu'est-ce qui garantit que ce phénomène ne resurgisse une autre fois ? s'interroge de prime abord le conférencier. Selon lui, toutes les phases de lutte contre ce phénomène ont été assumées avec succès durant la longue crise qu'a connue notre pays, mais on remarque aujourd'hui la négligence totale de l'aspect « après-crise », qui doit être impérativement pris en compte par les autorités. Le but étant de soigner le mal à la source et en vue d'éviter de sombrer encore une fois dans la même crise. Aucun centre de recherche et d'étude sur le terrorisme n'existe en Algérie, alors qu'à l'échelle mondiale on compte plus de 5000 centres dans ce domaine, souligne M. Berkouk, directeur de centre d'Echaab à titre indicatif. M. Adimi qui craint des répercussions à long terme revient sur les effets psychologiques et le travail de fond qu'il faut faire sur les différents paramètres de ce phénomène transnational. Comment un enfant ou un jeune peut s'en convaincre d'ôter la vie à un agent de l'Etat ? Qu'est-ce qui l'a poussé à s'adonner à la violence et à la barbarie ? Pourquoi prendre les armes et les utiliser contre un Etat ? Telles sont les questions qu'il faut poser au niveau d'un centre de recherche spécialisé public ou privé, déclare M. Adimi, estimant qu'il est temps de « cicatriser définitivement la plaie ». Par ailleurs, il affirmera en s'appuyant sur ses propres études dans le domaine que « le terrorisme a triomphé en Algérie durant les années 90 grâce aux moyens de communication. Les images et les photos ont desservi l'Algérie. Certains titres sont devenus à l'époque des tribunes pour les groupes terroristes. Le journal « El Mounkidh » diffusé à l'époque plus de 100.000 exemplaires. Ce qui en dit long sur le rôle que doivent jouer les médias, en vue de changer en premier lieu les mentalités. Ce qui ne peut se faire sans une élite. Pour s'immuniser à l'avenir, et mettre fin définitivement aux résidus du terrorisme, il faudrait après 20 ans de pluralisme médiatique, développer « la presse d'opinion », devant servir de tribune pour l'élite algérienne. En plus de cela, recommande-t-il, il est grand temps d'ouvrir le champ audiovisuel, étant donné, justifie-t-il, « une seule chaîne publique, même avec de grande compétences, ne peut en aucun cas combler le vide ». Cette ouverture doit se faire cependant, selon lui, en exigeant des cahiers de charges, stipulant clairement qu'il ne faut en aucun cas porter atteinte aux symboles de la nation, la religion, son unité…ces nouveaux supports médiatiques, doivent contribuer à la création « des symboles d'élite », qui devront à leur tour porter la charge d'éclairer l'opinion publique. « Aujourd'hui, force est de constater, le seul symbole c'est le footballeur. Le studio peut remplacer la rue, qui est marquée souvent par une certaine violence », lance-t-il, avant de lancer un appel direct à l'élite scindé en deux, arabophones et francophones pour se retrouver dans un même objectif national. En conclusion, M. Adimi suggère de revoir en premier lieu le traitement de l'information sécuritaire et de mettre en place une institution spécialisée dans l'écriture des prêches des mosquées. Le contenu des prêches des les imams doit être bien étudié . Ce qui nécessite, selon lui, l'association des politiciens, les hommes de culture et autres pour que le prêche ne soit pas « l'apanage de l'homme de religion ». Plus de 12.000 mosquées sont réparties à l'échelle nationale et que fréquentent 15 à 20 millions d'Algériens. N'est- ce pas là un lieu où l'on peut parfaitement passer de nombreux messages, dans le but de « construire et non de détruire »?