“L'Algérie est devant deux choix : soit ouvrir l'espace à l'élite et l'encourager, soit revenir à la situation d'avant, une situation de violence, de destruction et de terreur, même si ce sera dans 10 à 14 ans”. Cet avis a été défendu, hier, par le chercheur et écrivain Ahmed Adimi, lors de la conférence sur “la communication face au terrorisme”, organisée par le Centre des études stratégiques d'Ech-Chaâb, à laquelle a participé le secrétaire d'Etat à l'Infor-mation, Azzeddine Mihoubi. Le conférencier a paru surpris que “personne”, pas même les autorités du pays, ne se préoccupe de la quatrième et dernière étape de sortie de la crise, qui consiste à se pencher sur les causes du terrorisme. M. Adimi s'est ainsi demandé, dans ce cadre, comment des enfants et des jeunes Algériens “ont pensé avoir le droit de tuer leurs semblables et de détruire l'Etat, les armes à la main”, comment aussi “une partie de la population a recouru au terrorisme contre une autre partie, plus importante”. L'auteur du livre portant sur le même thème que la conférence a en outre déploré l'absence totale de travaux sur cet aspect du phénomène par les quelques centres de recherches existants sur le territoire algérien, alors que le pays a été confronté de très près au problème terroriste et à son lot de drames (pertes humaines, blessures, dégâts matériels…), en subissant aujourd'hui encore ses conséquences, à travers l'émergence d'autres formes de violence, à l'exemple du banditisme, de la violence dans la rue et de la violence contre les femmes. Selon lui, les études sont capitales, surtout dans l'étape actuelle, pour que “les mêmes tragédies ne se reproduisent plus” et pour la prise des décisions. Tout le long de son exposé, le chercheur a défendu l'idée de la communication, lorsque celle-ci rime avec la production de “symboles nationaux positifs” et l'expression de l'intelligentsia et de l'élite. D'après lui, celle-ci par “ses éclairages, ses explications et ses orientations”, mais aussi à travers “des études, des livres, des films, de la musique et de l'art en général”, constitue avec “le débat d'idées”, la meilleure attaque contre les racines du terrorisme. L'invité d'Ech-Chaâb a reconnu qu'il y a un effort à faire, dans ce sens, car l'Algérie, comme la plupart des pays arabes, est plus versée dans l'oralité, au détriment de la capitalisation de ses expériences et des leçons tirées. “Si nous voulons approcher de près les raisons ayant permis l'émergence du terrorisme, il faut aussi que des études académiques soient menées par des centres de recherches privés et des centres appartenant à l'université”, a déclaré Ahmed Adimi, en plaidant dans le même temps pour l'ouverture de nouvelles spécialités à l'université algérienne, en relation avec le phénomène de terrorisme/violence. L'orateur a égratigné au passage les partisans du mépris du “ghachi” (populace) et le système éducatif qui, dira-t-il, “n'a pas inculqué la rationalité à l'enfant ni appris à réfléchir sur tous les sujets, même ceux liés à la sacralité”. Concernant la presse nationale, il a constaté qu'après 20 ans de pluralité, la presse d'opinion est toujours absente. Par ailleurs, il a appuyé l'ouverture du champ audiovisuel et proposé la création d'un organe chargé d'élaborer les prêches composé de membres de diverses disciplines. “Nous vivons dans un nouveau monde, le monde de l'Internet…”, a-t-il souligné, en appelant à franchir le pas vers “la modernité et l'ouverture d'esprit”.