Résumé de la 1re partie n Torpillé, le croiseur «Amiral charner» fait naufrage. Joseph Carriou se retrouve sur un radeau avec treize autres membres d'équipage... Les quatorze survivants se regardent, hébétés. En quelques secondes, leur vie a basculé. Ils ne sont plus que des naufragés qui luttent pour leur vie. Si Joseph Cariou est à peu près indemne, tous ne sont pas dans le même cas : plusieurs sont blessés, dont un à la tête, qui semble avoir perdu l'esprit et qui ne cesse de murmurer des choses incompréhensibles. Ils n'ont, bien sûr, rien pu emporter, ni vivres ni eau, et ils n'ont plus que des vêtements déchirés qui ne les protègent pas du froid. Mais ils veulent garder espoir : la côte libanaise est en vue et ce seul fait suffit à leur maintenir un moral à peu près acceptable. Ils n'échangent que peu de paroles qui se veulent optimistes. — Le courant va nous pousser vers la côte... — Les recherches vont commencer. On va nous secourir. Si ce sont les Allemands et si on est fait prisonniers, tant pis... Les heures passent, dans le silence, à part la litanie ininterrompue du blessé à la tête. Au froid du petit matin a succédé un soleil ardent, qui provoque chez tout le monde une soif intense, même si personne ne le dit. Quant à l'espoir de se rapprocher du rivage grâce au courant, il disparaît bien vite. Il est visible, au contraire, qu'ils dérivent en sens inverse et qu'ils sont irrésistiblement emportés vers le large. Lorsque la nuit tombe, le Liban a disparu. Et c'est alors le drame. Le blessé se met à rugir dans le noir : — A boire ! J'ai soif ! Il se lève, faisant vaciller l'embarcation. Joseph Cariou et d'autres essaient de le maîtriser, mais il se débat comme un forcené et l'inévitable se produit : le radeau chavire avec tous ses occupants. Tout le monde se retrouve dans l'eau redevenue glacée et c'est une lutte hallucinante pour la survie. Chacun essaie de revenir au radeau, on s'agrippe, on se bouscule, on se bat. Joseph reçoit des coups, il en donne. Enfin, il parvient à se hisser sur la planche... Le calme est revenu. II s'endort, épuisé. Lorsqu'il se réveille, au petit matin, il constate qu'ils ne sont plus que huit. Il y a exactement vingt-quatre heures que l'«Amiral Charner» a sombré. Le deuxième jour commence pour les survivants il va être le plus terrible de tous. Au début, tout se passe plutôt bien : la mer est calme, même si le courant continue d'entraîner le radeau vers le large, et le soleil réchauffe les corps glacés par le froid de la baignade forcée. Mais vers midi c'est le cauchemar qui recommence. La chaleur cesse d'être bienfaisante, elle provoque de nouveau la soif et l'effet est terrible sur les organismes affaiblis. De tous, c'est sans nul doute Joseph Cariou qui est dans la meilleure forme physique. C'est le plus costaud, il est même bâti en athlète, de plus il est l'un des rares à ne pas être blessé, car la bagarre de la nuit a laissé des traces. Bien sûr, il souffre de la soif, il a l'impression que sa langue a doublé de volume et il n'a plus de salive. Son corps est douloureux aussi : sa peau est rongée de sel, elle le gratte, elle le brûle. Mais il ne tarde pas à s'apercevoir que son calvaire n'est rien à côté de celui de ses compagnons. Il assiste bientôt à un spectacle hallucinant. Les plus atteints sombrent dans une torpeur profonde. On pourrait croire qu'ils vont tomber dans le coma et ne pas se réveiller. Mais non. Ils se dressent soudain, un rictus à la bouche, les yeux hallucinés, ils hurlent : — A boire ! De l'eau ! (à suivre...)