Révolution n Si des frontières peuvent contrôler la circulation des hommes et des biens, aucune d'entre elles, en revanche, ne peut arrêter des idées, des images par satellites ou des appels téléphoniques. Il paraît donc clair que nous ne pouvons nous isoler du reste du monde et tout ce qui se passe dans le monde a forcément des répercussions, même petites chez nous. A commencer par les différentes formes de violence que nous voyons presque tous les jours à la télévision. Il y a trente ans, avant que les paraboles n'envahissent nos toits et nos terrasses, les seules violences physiques que nous connaissions étaient, soit des crimes d'honneur, soit des crimes crapuleux, soit enfin des crimes liés à des contentieux entre deux individus qui réglaient leur compte dans le sang. L'assassinat en 2006 du jeune Walid à Hussein Dey, un petit garçon en troisième année primaire et dont le corps a été déposé dans l'immeuble de sa tante, n'est certainement pas gratuit et rappelle étrangement cet autre assassinat en France d'un autre petit garçon en 1990 et dont le bourreau qui signait ses lettres par «le corbeau» expliquait son geste par le seul mobile de la vengeance. De nombreux kidnappings à l'évidence ne seraient pas l'œuvre de terroristes en mal de trésorerie, mais bien du grand banditisme national qui découvre là une manne providentielle pour s'enrichir à moindre frais. Le chantage au portable sur lequel des scènes d'ébats amoureux ont été filmées et diffusées sur Internet, entre de plus en plus dans les mœurs et apparemment n'a pas l'air de s'arrêter. Une jeune fille de 24 ans débauchait, il y a quelques mois, des mineurs à leur sortie d'un lycée à Aïn Témouchent pour les faire ensuite chanter avec la complicité d'une camarade. Elle a, bien sûr, été arrêtée en flagrant délit. Mais quelles que soient les formes que prennent ces nouvelles violences importées dans notre pays, elles n'auront jamais et n'atteindront jamais les dimensions «industrielles» qui ont cours ailleurs. Nous n'avons pas de snipers fous qui tirent dans le tas, dans la foule pour tuer le maximum de citoyens au hasard. Nous n'avons pas de violence qui tétanise tout une ville comme ce fut le cas dans une grande banlieue parisienne pendant des années. Nous n'avons pas de tueurs en série qui attendent dans le couloir de la mort le moment de passer au gril de la chaise électrique. Nous n'avons pas de pères fous de rage qui exterminent leurs propres enfants avant de se donner la mort parce que leurs épouses les ont abandonnés. Chez nous, c'est tout le contraire, ils feraient même une fête quand la mère prend la clef des champs et libère l'appartement. Bref, nous n'avons rien de tout cela pourvu, comme disait la mère de Napoléon, que cela dure.