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Les GGF traquent les contrebandiers à Maghnia
Trafic de drogue, gasoil, immigration clandestine
Publié dans Liberté le 11 - 06 - 2005

Cette cité frontalière avec le Maroc est, pauvreté et misère aidant, le carrefour de tous les trafics.
La RN35 connaît un intense trafic en ce lundi du mois de juin. Cet axe routier a certes perdu de son animation des jours “fastes”, lorsque la frontière était ouverte mais les choses ne semblent pas aller mal. Du moins pour les trafiquants qui écument la région. La route vient de bénéficier d'une aubaine pour les chauffards qui ne ménagent pas le champignon. Le véhicule du groupement de la gendarmerie d'Oran, gyrophare et sirènes en action, réussit tant bien que mal à créer un couloir contre le flot de voitures venant de et vers Maghnia.
Après une nuit passée dans la capitale de l'Ouest, le groupe de journalistes s'apprête à faire une visite au niveau du tracé de frontière avec le Maroc, une initiative de la cellule de communication du commandement de la Gendarmerie nationale.
Pourtant, la terre est loin d'être avare ici, en atteste la production de pommes de terre qui a raflé la médaille à Mascara. Ce n'est qu'un leurre. Un avantage qui n'arrive pas à persuader la population locale dont une bonne partie, frappée de plein fouet par le chômage, croit dur comme fer que la solution à la misère se trouve dans l'activité de la contrebande. Un fléau que n'arrive pas à juguler les autorités pour sa complexité.
En effet, bien malin celui qui réussirait aujourd'hui à assurer une sécurité au niveau du tracé de 440 km qui sépare les deux pays voisins. Une bande frontière presque fictive à certains endroits. Dans le point de presse animé par le capitaine Bouabid au siège du premier groupement des gardes frontières de Maghnia, l'on saura que les deux points de passage les plus importants sont Maghnia avec une superficie de 294 km2 (110 000 h) et Beni Boussaïd (329 km2-12 000h). Un immense territoire difficile à couvrir eu égard à la fréquence des contrebandiers mais aussi des terroristes. “Pour nous, il s'agit de veiller à tout mouvement suspect. Nous ne faisons pas de distinction avant identification, ce qui n'est pas toujours évident”, dit-il. Il est vrai que la région est traversée par toutes sortes de trafiquants. Du simple passeur de produits alimentaires au narcotrafiquant en passant par l'immigrant clandestin. La prédominance est à la contrebande de gasoil. “Notre souci majeur est de lutter contre le fléau sous toutes ses formes”, abondera le conférencier en donnant quelques chiffres significatifs. En 2004 plus de 400kg de kif traité ont été saisis au cours de 12 opérations.
Durant la période allant du 1er janvier au 31 mai de l'année en cours, 2kg de kif ont été saisis. L'étau s'est-il pour autant resserré ? “Il est très difficile d'accomplir une mission comme la nôtre en raison de la complicité des habitants de part et d'autre de la frontière”, observera notre interlocuteur. Les familles se connaissent entre elles. Des liens de mariage existent aussi. Une réalité qui complique davantage le travail des GGF. On ne peut reconnaître un Algérien d'un Marocain à cause de l'absence de pièces d'identité que les contrebandiers ne portent jamais sur eux. De plus il faut savoir que les riverains possèdent des terres sur la bande frontière. “De ce fait nous ne pouvons intervenir qu'à l'intérieur des 200m qui constituent la frontière réelle”, précise l'officier.
Au chat et à la souris
Les méthodes et procédés utilisés par les trafiquants sont en éternel changement. Ils disposent de tous les moyens leur permettant de mener une opération avec succès. La complicité est de mise. Toute personne isolée devient suspecte. Des bergers munis de téléphones portables, des gens qu'on ne pourrait suspecter de quoi que ce soit et d'apparence innocente s'avèrent être de véritables indicateurs au service des gros bonnets de la contrebande.
En somme c'est l'histoire du chat et de la souris. Concernant le trafic de carburant, l'officier supérieur parle du triangle Sidi Djilali, Maghnia et Bab El Assa où un pourcentage de près de 90% de l'activité est enregistré. Plus loin entre Aïn Sefra et Mecheria (Naâma),le lieu dit Mekmen Ben Amar est un point privilégié pour le passage des stupéfiants. La contrebande connaît des périodes de pointe pour chaque produit à l'exemple des produits alimentaires durant le mois de Ramadhan. En revanche, l'été est la saison des stupéfiants. Evidemment, tous les jours de l'année restent propices pour les contrebandiers pour peu que le “renseignement” travaille. À ce sujet, le colonel Bounegab raconte que parfois ses éléments font l'objet de filature par les contrebandiers. “Une raison de plus pour rester vigilant”, fait-il noter.
Le mot est lâché ! Toutefois l'on ne peut s'empêcher de s'interroger sur ce qui retient les pouvoirs publics d'en finir avec ce fléau qui ronge l'économie nationale. Y a-t-il une réelle volonté politique ? Si oui, comment expliquer les difficultés rencontrées par les corps constitués notamment les gardes frontières dans l'accomplissement de leur mission ? Ont-ils tous les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs escomptés ? Faut-il ouvrir les frontières ? “La question ne sera jamais réglée. Au contraire, la contrebande ira crescendo au détriment bien sûr de notre économie”, répond le lieutenant-colonel Salah. Un petit sondage fait au sein de la population de Maghnia prouve, on ne peut plus clair, que la contrebande contribue d'une manière manifeste à l'amélioration du pouvoir d'achat. La pauvreté existe certainement. Tout le monde est impliqué dans la contrebande. Le cas de cet épicier est édifiant : “Je suis passeur depuis des années, j'encaisse 3 000DA par personne “, dit-il. Pour le compte, le soin est laissé au lecteur dès lors que ce commerçant effectue une vingtaine d'opérations en moyenne par mois.
Tous les chemins mènent à la contrebande
“Nous passons une bonne partie de notre temps à fermer les issues menant vers l'autre côté de la frontière. Aussitôt colmatée, une brèche est rouverte pour être de nouveau utilisée”, explique le colonel Bounegab. Les brèches, ce sont de petits sentiers que les contrebandiers utilisent pour faire passer du gasoil à dos de bêtes de somme, sur des charrettes, des mobylettes ou carrément à la main. Notre interlocuteur ajoute : “Les jerricans vides sont posés en bordure de ces sentiers. Une fois remplis par les complices, les contrebandiers viennent les chercher après s'être assurés que le danger est écarté. Il arrive aussi qu'ils les abandonnent.” Une véritable saignée infligée à l'économie nationale.
Pour la seule période du 1er Janvier au 31 mai de l'année en cours, les gardes frontières ont saisi 94 844l de gasoil et 6 084l d'essence contre 107 650l de gasoil et 13 527l d'essence pour la même période de l'année 2004. Une autre question s'impose : où est le rôle des autorités compétentes face à la prolifération des stations- service dans la wilaya de Tlemcen qui en compte 67 ? La ville de Maghnia dispose à elle seule de 7 stations-service.
Au moment de notre arrivée à un poste avancé, notre attention est attirée par deux individus que les éléments du GGF nous présentent comme des contrebandiers. Deux jeunes hommes de 28 et 25 ans, arrêtés la veille. Ils transportaient, chacun sur une mobylette, 4 jerricans de 30l de gasoil. Après autorisation, nous entamons avec eux une discussion très édifiante sur les conditions de vie misérables de l'autre côté de la frontière. Ils sont arrivés d'Oujda où, disent-ils, le chômage est un véritable fléau. “C'est pour gagner ma vie que je fais cela. Je n'ai aucun autre moyen pour subvenir aux besoins de ma famille”, dit le plus âgé qui précise qu'il gagne 10 dirhams sur chaque bidon de 20l. Il mentionne que les mekhasnis lui exigent de payer 10 dirhams à chaque passage. Sinon des représailles sont infligées sans aucune forme de procès. “Ils nous traitent comme des moins que rien. Si jamais les gardes frontières algériens nous remettent entre leurs mains, on risque de ne plus revoir le soleil”. Il s'accroupit et éclate en sanglots, une scène qui apitoie une consoeur qui verse quelques larmes. Les gendarmes nous font comprendre que c'est une simulation. Le jeune homme ne manque pas de parler de la différence dans la communication entre les corps algérien et marocain. Nous quittons ce poste pour Akid-Lotfi. “Là-bas à hauteur des oliviers, c'est déjà le Maroc”, annonce le colonel. Sur tout le long du tracé frontalier, les tranchées témoignent de la volonté du côté algérien de freiner toutes sortes de fuites. “Nous les avons creusées avec nos propres moyens”, fera-t-il remarquer. À l'intérieur du poste, une charrette pleine de jerricans de gasoil venait d'être saisie. Le propriétaire a dû fuir à la vue des gendarmes préférant abandonner la marchandise.
Akid Lotfi-Zouj Bghal : l'expectative
Relooké suite à l'annonce avortée de son ouverture, le poste-frontière ressemble à une infrastructure attendant désespérément son inauguration. Pour le moment, les agents de la PAF, d'un côté comme de l'autre, se regardent comme des chiens de faïence. Ceci dit, les douaniers marocains avec qui nous avons discuté n'ont pas caché leur souhait de voir la frontière ouverte. Mieux, ils reconnaissent que la libre circulation aura un impact économique considérable. C'est ce que nous a confirmé un citoyen marocain d' Oujda. “La majorité des commerçants végètent depuis1994. Le plus gros de la clientèle était à l'époque faste algérien”, a-t-il dit. C'est par ce lieu que passe également une bonne partie des immigrants clandestins.
Six Sénégalais sont entre les mains des gendarmes. Ils ont été refoulés la veille par les Marocains. Mohamadou (22 ans) parle français, le peuhl et comprend l'arabe. Il déclare avoir appris le Coran à la zaouïa Tidjania. Un beau jour, il décide en compagnie de jeunes de son village et de son frère cadet (17 ans) de quitter le pays. Ils passent trois mois au Maroc et rentrent en Algérie dans le but de rejoindre l'Espagne où ils pourront, selon l'interlocuteur être hébergés par des compatriotes étudiants. Mohamadou raconte qu'il a versé 1 000 euros à un passeur qui lui a fait miroiter un voyage outre Méditerranée. À présent, il lui reste 700 euros qu'il ne sera pas près de dépenser en Espagne comme il le désirait. Les six Sénégalais devraient en principe être présentés le lendemain devant le procureur de le République. Une formalité qui ne semble pas inquiéter outre mesure Mohamadou. Dans sa tête, la destination espagnole est déjà une idée fixe. De toute manière, il ne veut surtout pas entendre parler d'un retour au Maroc. “Le Sénégal, c'est nettement mieux que le Maroc. C'est la misère partout”.
Deux stars à Tekkouk
Ce lieu est un point important de contrebande. En 2004, plus de 379 kg de kif ont été saisis. Pour y accéder, il faut emprunter la RN21, plongée dans le noir total de cette nuit de mardi. En quittant cette dernière, la piste devient un supplice pour les Nissan alignées en cortège. Tekkouk, c'est aussi un passage privilégié des trafiquants de carburant. Les saisies sont au quotidien.
Il existe plusieurs postes avancés : Oued Chlafa, ferme Dada, Ben Sbaa et la Piste. S'il n'est pas toujours évident de tomber sur des contrebandiers qui ne prennent pas de risques gratuitement, on peut en revanche tomber nez à nez sur des créatures pour le moins insolites. Des bourricots chargés de bidons de mazout, guidés par leur instinct vers une destination à laquelle ils sont initiés. Ici l'âne vaut plus qu'un étalon. Au point dit la Piste, nous avons pu rencontrer deux roussins d'Arcadie d'une race peu commune. Le plus petit porte une barbe le distinguant des autres quadrupèdes. Peut-être que cette espèce serait plus réceptive aux instructions.
De mémoire d'âne, jamais un animal solipède n'aura autant été sollicité par les photographes. Cette nuit, la moisson est plutôt bonne : plus de 1000l de mazout saisis. Parfois la quantité passe au triple. Le coup porté à l'économie nationale est cinglant car si on connaît les quantités saisies, l'on ne peut que rester de glace devant les grosses fuites. Il ne faut surtout pas incriminer les GGF. Les conditions de travail sont des plus pénibles. On ne peut même plus parler de volonté politique, ceci est prouvé sur le terrain. L'Algérie n'est pas la seule à être concernée par le fléau de la contrebande et surtout du trafic de drogue dont est à l'origine le pays voisin.
L'UE est interpellée pour jouer un rôle positif dans cette question. Elle a bien financé le système de contrôle électronique des frontières au profit du Maroc. Comme si l'Algérie était à l'origine du mal. Si l'on veut que l'Algérie soit un poste avancé pour la lutte contre l'immigration clandestine et le trafic des stupéfiants, il sera impératif qu'une coopération dans ce cadre soit effective et efficace. Que notre pays soit transformé en centre de transit n'est pas une solution.
Lutte contre la contrebande
Période allant du 01/01/05 au 31/05/05.
Exportations illégales : 178 affaires.
Importations frauduleuses : 79 affaires.
Immigration clandestine :
a - Refoulement par jugement* : 212
b - Nombre de personnes arrêtées* : 174
c - Personnes arrêtées
au niveau des postes avancés* : 309
d- Refoulement sans jugement*: 308
*a : 5 nationalités
*b : 6 nationalités
*c : 13 nationalités
*d : 20 nationalités
A. F.


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