Risques n La menace d'attaques des talibans plane plus que jamais sur la présidentielle, faisant craindre une abstention massive des électeurs. Plus l'élection du 20 août se rapproche, plus les experts s'interrogent sur sa crédibilité, avec une liberté de vote et une participation menacées par les violences, la désillusion de la population, les pressions, les arrangements en coulisses et les fraudes. Les violences ont atteint ces derniers mois des niveaux inédits en Afghanistan depuis la chute des talibans fin 2001 et pourraient conduire beaucoup d'Afghans à s'abstenir jeudi prochain de voter pour l'élection présidentielle et pour les conseils provinciaux. L'attentat suicide qui a tué, hier, samedi, sept civils afghans devant le QG de la force de l'Otan au cœur même de Kaboul, est venu alimenter cette crainte, infligeant un véritable camouflet au gouvernement du sortant Hamid Karzaï et à ses alliés occidentaux, qui avaient promis de tout faire pour sécuriser la campagne et les opérations de vote. Un nombre important des 17 millions d'inscrits resteront chez eux, notamment par peur des attentats suicide, selon des analystes. Et plus de 10% des quelque 7 000 bureaux de vote pourraient rester fermés en raison de l'insécurité, selon la commission électorale. Par voie de conséquence, une faible participation risque de compromettre la légitimité du double scrutin de jeudi, souligne le directeur de la Fefa, principale organisation afghane d'observation des élections. Plusieurs analystes redoutent également des fraudes massives, comme Wadir Safi, un professeur de sciences politiques à l'université de Kaboul, qui annonce déjà «des élections truquées» par les chefs de guerre au pouvoir dans les provinces, qui ont, selon lui, marchandé le vote de leurs électeurs en échange, par exemple, d'une place au gouvernement. Plusieurs témoignages indiquent aussi que des candidats ont fait campagne en distribuant de l'argent. Les observateurs soulignent qu'une bonne partie des illusions de démocratisation nées lors de la présidentielle de 2004 (75% de participation) se sont envolées en cinq ans, ce processus n'ayant guère renouvelé une classe politique dominée par les mêmes chefs de guerre. Les élections afghanes du 20 août interviennent, par ailleurs, à un moment pivot pour l'administration Obama, qui injecte troupes et moyens dans une mission de plus en plus ambitieuse et condamnée à durer face à une insurrection tenace. La tenue du scrutin en Afghanistan constitue un test important pour les forces armées américaines et internationales de l'Otan, mobilisées pour permettre aux Afghans de voter librement et en sécurité. Mais au-delà de cette échéance électorale, c'est au cours des prochains mois que sera jugé l'engagement américain en Afghanistan, qui n'a cessé de prendre de l'ampleur depuis l'arrivée à la Maison-Blanche de Barack Obama, alors que la situation sur le plan de la sécurité n'a jamais été aussi grave. Le Président américain, qui a érigé le front afghan en priorité de son mandat, a, pour le moment, ordonné le déploiement de 21 000 soldats supplémentaires, ce qui portera leur nombre à 68 000 d'ici à la fin de l'année.