Le mois sacré du ramadan est accueilli chez les familles constantinoises avec un certain rituel culinaire qu'on retrouve rarement ailleurs. Ces traditions particulières à la ville et sa région sont perceptibles dès la veille de l'avènement du quatrième pilier de l'Islam ou à l'occasion du premier «f'tour». Ainsi, qu'elles soient riches où aux ressources limitées, les familles constantinoises s'arrangent comme elles peuvent pour avoir sur leur maïda «tadjine el aïn», un mets savoureux à base de pruneaux écrasés auxquels on ajoute des noisettes et de la viande, de préférence bovine, saupoudrée de sucre raffiné. Ces signes sont également perceptibles à la vue, dès l'apparition des traditionnels plats de «chorba» à base de «frik» ou blé séché, grillé, broyé et écrasé qui ne doit plus quitter la table du f'tour durant toute la période de jeûne. Cette céréale qui remplace, au fil des jours, l'éternel vermicelle, a été, auparavant, très soigneusement nettoyée, sassée, triée avant d'être étalée et exposée au soleil pour être séchée naturellement. Des gestes accomplis sous la vigilance des aînées, soucieuses de la préserver notamment des volailles friandes de ces grains et d'éventuelles actions indésirables à même d'altérer leur qualité. «Ces mets sucrés sont à même de remplacer la quantité calorifique dépensée par l'organisme durant les heures d'abstinence, croient savoir la plupart des ménages de la ville des Ponts suspendus et de ses environs. Aussi, «le plat de résistance ne doit, en aucun cas, être dépourvu de l'odeur de la viande, qu'elle soit rouge ou blanche», explique une ménagère pour qui l'omniprésente «zalabia» et le «qalb ellouz» doivent garnir la table du ramadan, notamment pendant les longues soirées familiales autour d'un plateau de café, de demi «charbat», de thé et de lait bouilli. En outre, comme à l'accoutumée, le premier jour de ce mois sacré est également accueilli à Constantine par la préparation d'un tajine plus traditionnel qu'on appelle «ghraief» ou «qarça» plus connu au centre et à l'ouest du pays sous le nom de «baghrir». L'éternel miel pur (assel horra) doit être à portée de la main pour que cette crèpe soit dégustée convenablement et appréciée à sa juste valeur.