Douceur n Il est difficile de résister à la tentation de savourer, ne serait-ce qu'un seul morceau, de la baklaoua ou des k'taef savamment préparés et découpés avec art et amour. Avec leur réputée gastronomie et les mille et une senteurs qui se dégagent de la vieille médina, les Constantinois réservent chaque année un accueil exceptionnel au quatrième pilier de l'Islam, le mois de ramadan, un mois de jeûne et d'abstinence. C'est avant tout le mois de piété, de recueillement et de solidarité entre musulmans, c'est pourquoi tous les lieux de culte de la ville, à l'image de la magnifique mosquée Emir-Abdelkader, se sont parés de mille et un lampions et préparés à l'afflux des fidèles. Mais le ramadan reste aussi celui des plaisirs de la table, des petits plats mijotés et des friandises de toutes sortes. Et à Constantine, peut-être un peu plus qu'ailleurs, on garde jalousement le secret de nombreuses recettes de gâteaux que l'on ne se transmet que de mère en fille. Certaines douceurs typiquement constantinoises exigent des soins spécifiques et nécessitent un surcroît de dépenses à cause de l'achat d'ingrédients coûteux mais indispensables, comme les noix, les noisettes, les amandes et les pistaches, sans compter le beurre qui doit provenir obligatoirement du lait de vache. Il faut reconnaître qu'il est difficile de résister à la tentation de savourer, ne serait-ce qu'un seul morceau, de la baklaoua ou des k'taef savamment préparés et découpés avec art et amour. Le premier jour de ce mois sacré est accueilli par la plupart des familles constantinoises par la préparation d'un mets encore plus traditionnel qu'on appelle ghrayef' ou qaràa, plus connu au centre et à l'ouest du pays sous le nom de baghrir. Le miel pur doit être à portée de main pour que les ghrayef' soient dégustés et appréciés à leur juste valeur. Pour les Constantinois, ramadan est également synonyme de purification de l'âme. Outre le jeûne durant la journée, les taraweeh, la nuit, et la prière du tahadjoud qui doit être arrêtée juste avant l'appel du muezzin à la prière de l'aube durant les dix derniers jours de jeûne, les familles constantinoises ont pour coutume de repeindre et de nettoyer à grande eau leurs habitations. Celles qui le peuvent achètent de nouveaux ustensiles de cuisine, en optant généralement pour ceux fabriqués en terre cuite, notamment les marmites pour la chorba frik (soupe traditionnelle à base de blé dur) et les différents tadjines. A Constantine, le ramadan est également, et surtout, une occasion, une de plus, pour les ménagères de replonger dans la douce ambiance culinaire, ou la gastronomie locale reprend toute son intensité, autant gustative que culturelle.