Aberration n Avec un peu de bon sens, ils se seraient épargné le ridicule de donner à des familles extrêmement à l'étroit… des logements encore plus étroits ! De deux choses l'une, ou les chiffres des logements réalisés jusque-là et livrés sont «politiques» et répondent à une stratégie bien définie et à des objectifs très clairs, ou la demande est tellement forte que l'offre est condamnée à rester à la traîne et cela quelles que soient les ambitions politiques affichées. Ce que nous constatons aujourd'hui sur le terrain est précisément que la tension sur le logement est intenable. D'abord parce que le parc immobilier existant est hors de prix, hors des bourses moyennes, ensuite parce que les prix des matériaux de construction flambent de mois en mois et enfin parce que les entreprises nationales de réalisation bâclent souvent leur travail sur le plan des délais et surtout de la qualité. Pour atténuer cette pression les pouvoirs publics sont allés jusqu'à livrer dans la hâte des F1 et même des F2 ! Avec un peu de bon sens, ils se seraient épargné le ridicule de donner à des familles extrêmement à l'étroit… des logements encore plus étroits. Mais en fin de course, le résultat est toujours le même. La crise est aiguë et la protesta n'est pas près de s'arrêter de sitôt. Nous le constatons un peu partout à travers le pays. Les livraisons se font au compte- gouttes et les attributions se font souvent désirer. Et comme tout le monde n'est pas servi en même temps, que les promesses succèdent aux promesses, l'émeute populaire en général n'est pas loin. Des routes sont barrées par des pneus brûlés, des sièges de mairie sont incendiés et parfois la foule surchauffée n'hésite pas à affronter les cordons de police appelés en renfort. Il ne se passe pas une semaine sans que des citoyens manifestent leur colère devant les sièges de daïra et de wilaya, gênant la circulation et empoisonnant l'existence à des gestionnaires bien calfeutrés dans leur bureau. En attendant que les bidonvilles et les taudis malsains soient rasés ou brûlés à Alger et ailleurs, que les sinistrés à Oran soient relogés et que toutes les favelas qui enlaidissent nos villes et nos villages disparaissent du paysage, un homme, n'en pouvant plus d'attendre, vient de proposer à Mascara… son propre rein contre un logement. L'histoire ne dit pas si la transaction a été conclue. Une chose est sûre : elle risque de donner des idées. Et ce ne seront certainement pas les statistiques survitaminées du ministère de l'habitat et de l'urbanisme qui relogeront les sans-abri et les mal logés.