Photo : S. Zoheir Par Amirouche Yazid Avoir un logement est un rêve pour beaucoup d'Algériens qui en sont dépourvus. Un rêve que le temps finit souvent par étouffer même avec les différentes formules introduites par les pouvoirs publics. Les diverses formules proposées jusque-là (AADL, logements sociaux, logements participatifs et autres) montrent de plus en plus leurs limites. Il est vrai que les formules en question ont contribué à résorber un tant soit peu ce problème et à répondre aux attentes des citoyens désireux d'acquérir un logement, mais pas au point de satisfaire tous les nécessiteux. Les formules d'acquisition d'un logement ne profitent en réalité qu'à une petite frange de la société, la classe moyenne étant exclue par les conditions d'éligibilité. Un examen de l'aide gouvernementale -incluant toutes les subventions au logement accordées par le biais de différents programmes publics- a montré que 15% de l'aide au logement allaient à la catégorie la plus pauvre des ménages urbains. Un pourcentage très faible comparé à la demande qui ne cesse d'augmenter. Le chiffre est un indice de la performance de la politique de logement en Algérie. «Une famille à revenus moyens doit épargner tous ses revenus annuels pendant environ neuf ans, en Algérie, pour être en mesure d'acheter un logement de qualité moyenne dans les grandes villes», expliquait une étude de la Banque mondiale. La même étude ajoute que la croissance importante de la demande de logement, due essentiellement à la démographie, se reflète largement dans des augmentations du prix des logements plutôt que dans l'augmentation de la production de logements. Ce qui est incontestable est que le prix du logement est extrêmement élevé en Algérie. Plus précisément, les prix du logement sont de loin supérieurs aux niveaux auxquels on pourrait s'attendre. L'Algérie ne se distingue pas des autres pays du Maghreb où c'est plutôt l'accessibilité du logement qui pose problème plus que la disponibilité du parc immobilier. Une situation qui a généré manifestement une véritable barrière qui se dresse devant tous les postulants au logement nonobstant la livraison des centaines de milliers de logements au cours de la dernière décennie. Le nombre de logements livrés aux citoyens demandeurs, si important soit-il, n'a pas atténué le poids de la crise.Prix élevéLa même étude soutient à cet effet que, lorsque l'accessibilité est examinée au moyen du ratio prix des logements/revenus, dans plusieurs des pays de l'échantillon, le prix du logement est extrêmement élevé et que les niveaux d'accessibilité sont faibles. Plus que cela. Il existe un excès des offres pour les groupes à revenus supérieurs et à moyens supérieurs, et une insuffisance de l'offre pour les segments à revenus plus faibles notamment en Algérie. Un architecte résume la problématique dans une interrogation : «Comment réaliser en masse, dans les meilleurs délais, au moindre coût dans le respect de la qualité conformément à la nécessité d'un programme surfacique clair ?» La question mérite plus d'attention aussi bien de la part de l'Etat que de la part des entreprises chargées des nouvelles constructions. Car chacune des étapes citées a ses propres conditions. Réaliser en masse est une tâche difficile à accomplir là où la bureaucratie impose ses règles. Bâtir dans les meilleurs délais est une chimère… algérienne. Construire au moindre coût et dans le respect de la qualité est un véritable programme électoral. Le chantier compte plusieurs acteurs et intermédiaires si bien qu'il est difficile de maîtriser le secteur par les, pouvoirs publics y compris quand la volonté ne manque pas. Les grosses sommes d'argent que génère le secteur de l'immobilier n'ont pas manqué d'attirer investisseurs et promoteurs. S'il y a bien des promoteurs et des bureaux qui s'acquittent de leurs missions dans le respect des règles, il faudrait néanmoins admettre que des «pseudo constructeurs» portent atteinte au secteur. Cette catégorie de promoteurs n'en finit pas de causer scandales et arnaques. Ces intrus sont incontestablement la source de tous les doutes et soupçons qui entourent le secteur du bâtiment. Les promoteurs s'en défendent aussi sur un autre chapitre. «Il y a des incohérences dans l'aménagement du territoire. Il y a de nombreux pôles urbains en Algérie où des promoteurs ne veulent plus investir puisqu'ils sont concurrencés par le logement social massif. Les programmes publics créent un réflexe d'attente chez les demandeurs», estime un jeune promoteur. Le nombre d'appartements qui ne sont pas occupés est l'autre face de la complexité de la question du logement en Algérie. Le problème se pose avec acuité dans les grandes villes du pays, particulièrement dans la capitale où des sources parlent d'au moins un million de logements que leurs propriétaires ferment tout au long de l'année. Un fait qui a rendu plus ardue la maîtrise de la question. Car, d'une part, les constructions ne servent pas la population. D'autre part, le fait de tolérer l'inoccupation de ces appartements engendre la spéculation qui punit tout candidat à l'achat ou à la location. Des familles, qui attendent encore de figurer sur la liste de bénéficiaires de logement, se déclarent incapables de payer les frais de leur location. Pourtant, les donnes devaient mener à une tarification abordable des prix de la location dans la mesure où l'offre est théoriquement plus élevée que la demande. Mais la fourchette des prix proposés n'obéit nullement à la loi du marché. L'intermédiaire des agences immobilières n'a pas débouché sur une régulation du marché. Une bonne partie des agences évoluent sans le moindre respect de la réglementation. Il a fallu un décret sur les agences immobilières pour voir une esquisse d'organisation dans les opérations de vente et de location. Une belle partie des agences exerce dans l'informel. Elles sont appelées à se conformer au nouveau texte ou à disparaître. «Les responsabilités sont désormais définies. Les droits des uns et les devoirs des autres sont aussi définis», se réjouit un membre de la Fédération nationale des agences immobilières. Comme attendu, le décret en question n'a pas été sans provoquer la disparition d'un nombre important d'agences, qui ne répondaient pas aux critères exigés. 5 147 agences immobilières existaient sur le territoire national, selon des statistiques de février 2008. Combien ont survécu au nouveau décret ? La réponse sera apportée par le fichier national, qui n'a pas encore vu le jour. Le fichier national du parc immobilier est d'autant plus attendu qu'il devrait permettre de définir les réalisations de l'Algérie ainsi que la demande des citoyens. La demande est constamment en hausse même si le rythme des livraisons a lui aussi augmenté ces dernières années. Le président de la République a promis lors de la campagne électorale de la présidentielle de trouver des solutions pour la problématique du logement. Les citoyens attendent.