En guenilles et pieds nus, des jeunes déambulent comme des fantômes dans un quartier historique décadent de Sao Paulo, en faisant la manche pour s'acheter du crack, un dérivé bon marché de la cocaïne. Ils ne mangent que rarement et dorment là où le sommeil les surprend. C'est dans ce quartier surnommé Crackolandia que les usagers du crack se rassemblent pour fumer cette drogue apparue en 2002 et qui a rapidement fait des ravages dans les pays latino-américains. En semaine, les drogués traînent sur la place de la Cathédrale où circulent des passants en costume-cravate qui vont travailler. Les week-ends, quand le quartier est déserté, ils étalent leur matelas par terre, renforçant l'aspect lugubre de l'endroit. «Je fume et je bois toute la journée», raconte en riant Jean Janzy à l'assistante sociale de la mairie qui vient de le réveiller. A 18 ans, Jean ne s'inquiète pas de ne pas avoir d'endroit où dormir. «Je me suis habitué à dormir dans la rue», dit ce jeune d'apparence fragile, qui arrive à gagner 100 dollars par jour mais s'en sert exclusivement pour acheter du crack. «C'est une drogue bon marché qui provoque une dépendance rapide et les effets sur la santé sont dévastateurs», explique l'un des responsables du Centre d'aide aux drogués (Cratod) à Sao Paulo. La sensation provoquée par le crack est très forte, mais passe rapidement et cela conduit l'usager «à vouloir en reprendre tout de suite, ce qui accroît sa dépendance», précise-t-il.