Livre n Le Djihadisme, l'Islam à l'épreuve de l'Histoire est un essai écrit par le sociologue Liess Boukra, paru aux éditions APIC, dans la collection Dissonances. Ce livre de plus de 400 pages s'emploie à dissiper l'amalgame entre la notion du djihad et celle du djihadisme : la première renvoie, selon l'auteur, «à la mobilisation guerrière de la communauté islamique, soit à des fins défensives, soit en vue d'islamiser de nouveaux territoires», alors que pour la seconde, «il s'agit d'un mouvement armé qui, se prévalant d'une idéologie politique d'extraction religieuse, vise à abattre les régimes au pouvoir dans leur propre espace islamique». Ainsi, pour illustrer sa thèse et l'étayer, l'auteur, en remontant dans l'histoire contemporaine, s'arrête à une date, marquant la naissance, et le début du djihadisme. «Ce djihadisme est survenu le 6 octobre 1981 avec l'assassinat du président égyptien El-Sadate, par un commando se revendiquant du groupe djihad», expliquera l'auteur. Et de poursuivre : «Pendant que le djihadisme s'intensifie au Moyen-Orient, notamment en Egypte, il s'entame en Algérie avec la formation, en 1982, du Mouvement islamique armé (MIA) qui, sous la férule de Mustapha Bouiali, passe à l'acte le 17 novembre de la même année, en attaquant un barrage de la Gendarmerie nationale à Ben Aknoun (Alger)». L'auteur, pour développer son exposé, donne un troisième exemple illustrant la notion du djihadisme, à savoir la guerre en Afghanistan, menée par les moudjahidine afghans et d'autres venus de l'espace islamique. «Au même moment, un djihad d'une toute autre profusion prospère en Afghanistan avec le soutien massif de l'Arabie Saoudite, du Pakistan et des Etats-Unis.» Et d'expliquer : «La résistance à l'invasion soviétique se décline sur le registre du djihad défensif. Toutefois, une nébuleuse arabe, contaminée par le germe dhihadiste d'extraction égyptienne, consolide ses rangs et astique son auréole à la périphérie de la lutte afghane.» «L'Afghanistan a été la contrée où le djihad fut phagocyté par le djihadisme», fait-il savoir. Le livre, un essai dense et fouillé, une étude franche et recherchée, menée avec méthodologie et sans détours, s'emploie à répondre à la question : qu'est-ce que le djihadisme ? Pour répondre à cette question, l'auteur, éminent sociologue, ayant publié plusieurs ouvrages sur les problématiques de la sociologie de notre siècle, notamment sur la question du terrorisme islamique, affirme que le djihadisme, qui aujourd'hui s'inscrit dans une vision globale, c'est-à-dire qu'il devient une entreprise mondiale, est né dans cette rupture radicale avec le monde d'aujourd'hui, est «l'expression d'un extrémisme religieux», écrira Liess Boukra. Le Djihadisme, l'Islam à l'épreuve de l'Histoire est fort intéressant parce qu'il nous renseigne sur notre réalité sociale, culturelle, politique et historique. C'est un éclairage sur le rapport qu'entretient la société musulmane avec le monde en continuelle mutation. D'où d'ailleurs la question : la société est-elle en mesure de faire face aux influences venues de toutes parts, même de l'intérieur de l'espace islamique, et aux agressions extérieures ? La société musulmane, avec ses problématiques et ses contradictions, peut-elle relever le défi, celui de la mondialisation, sans pour autant tomber dans l'extrémisme religieux ?