Résumé de la 5e partie Le capitaine et le ferrailleur se soûlent pendant la nuit de Noël. Quand ils se réveillent le lendemain, il y a des flamants roses. Un train d?atterrissage de bombardier, c?est hydraulique. On peut s?en servir comme d?un vérin. Avec le compresseur, ils ont envoyé la pression d?huile. L?étrave n?a pas bougé. Ils ne s?y attendaient pas. Leur idée, c?est qu?à ce moment, par cette poussée de bas en haut et légèrement latérale, l?étrave devait être seulement décollée du sable. De ce sable mouillé qui faisait ventouse et qui avait résisté à trois remorqueurs ! Alors, quand la pression d?huile a été au maximum dans le vérin improvisé, Marcel Bianchi est monté sur le bulldozer, qui était gros comme une mouche par rapport au cargo. Il a pris son élan et a visé le côté de l?étrave ; il a accéléré à fond et il est rentré dedans. A trente kilomètres à l?heure au moins. ça a fait un très grand boum, qui a résonné dans tout le cargo. Le train d?atterrissage est tombé dans le sable, parce que l?étrave avait fait un bond de trois centimètres ! Le capitaine Contos a fait un bien plus gros bond. Marcel Bianchi a éclaté d?un rire énorme et a failli pleurer. Parce que les soixante Arabes se sont mis à taper sur le toit des camions, en cadence, et ont entonné une chanson ! Il y en avait qui dansaient sur les capots ! Les flamants roses et tous les autres oiseaux, au moins deux mille, se sont envolés en piaillant ! Contos a grimpé à l?échelle de coupée et il a fait marcher la sirène. ça a fait un chahut épouvantable. Jamais une plage déserte n?en avait vu autant... Le capitaine et le ferrailleur ont mis deux mois, centimètre par centimètre, à faire virer l?étrave du cargo jusqu?à ce qu?il soit face à la mer. Chaque fois, ils replantaient la plaque de tôle, remettaient en place le vieux train d?atterrissage de «forteresse B17». Et chaque fois, Marcel Bianchi fonçait avec le bulldozer. A la fin, à marée basse, il fonçait dans l?écume des rouleaux. Le 21 mars 1957, la grande marée d?équinoxe a entouré le «Tarfaya» qui était, enfin, face au large. Un seul petit remorqueur, dont le patron avait bien voulu accepter d?être payé après, si ça marchait, a aidé le cargo à être renfloué. Son hélice s?est mise à battre, le capitaine Contos a encore hissé tous les pavillons et refait marcher sa sirène, cette fois sans interruption pendant un quart d?heure ! Les flamants roses, qui avaient l?habitude de passer l?hiver dans ce coin pour ne pas être dérangés, se sont encore envolés en piaillant. ça a fait, dans le ciel, comme des centaines et des centaines d?oriflammes. C?était très beau. Le capitaine et le ferrailleur se retrouvaient propriétaires d?un cargo de six cents tonneaux en parfait état ! Du moins, ils le croyaient. Marcel Bianchi s?était endetté, le capitaine Contos était quand même dans son tort... Il y a eu un procès interminable, et les compagnies d?assurance, comme toujours, ont été les seules à s?y retrouver. Avec les flamants roses.