Projection n «Ces enfants sont évidemment appelés à devenir adultes et il faut leur donner un nom afin de leur éviter des épreuves aux conséquences incertaines.» C'est ce qu'a souligné le président de la cellule d'aide judiciaire pour la mise en œuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, Maître Merouane Azzi. Il a plaidé donc pour l'instauration d'un cadre juridique spécial pour la prise en charge des enfants nés au maquis durant la tragédie nationale. Soulignant que ces enfants sont au nombre de 500, chiffre approximatif selon lui, Me Azzi a précisé que 40 familles ont été portées sur le registre d'état civil assurant à leurs enfants une identité. Il s'agit notamment de la confirmation de la filiation à travers une procédure judiciaire devant le service d'état civil pour corriger et officialiser une union qui s'est faite au maquis suite à un mariage «ourf» (avec la Fatiha), a-t-il expliqué. Selon lui ,40 dossiers sur 100 ont été traités entre 2007 et 2008 au niveau de 7 cours de justice à savoir à Alger, Boumerdès, Tizi Ouzou, Chlef Bouira, Jijel et Batna. La cellule a régularisé les dossiers répondant aux conditions requises à savoir la présence de la mère et du père. Toutefois, les dossiers non conformes, c'est-à-dire au cas où les parents de l'enfant seraient décédés, demeurent suspendus. D'où la nécessité, a-t-il dit, de mettre en place un outil juridique pour leur prise en charge. Cette loi permettra, selon lui, de faire des recherches, d'ouvrir des enquêtes et de traiter minutieusement les dossiers restants en procédant notamment à des analyses d'ADN. «Les services de sécurité possèdent l'effectif des terroristes abattus, il est donc possible de se rapprocher des familles des repentis pour éventuellement identifier l'origine de l'enfant», a-t-il estimé. Il a expliqué que «généralement c'est le couple, ou alors les femmes seules, ou bien un membre de la famille – soit l'oncle, soit la tante de l'enfant – qui se présente au niveau de la cellule chargée de mener ces actions de réinsertion conformément aux procédures judiciaires et au code de la famille». Maître Merouane Azzi ajoutera qu'il est possible que certains enfants soient placés dans une famille d'accueil ou même récupérés par leurs propres parents biologiques par le biais d'un avocat ou d'autres voies réglementaires, soulignant la nécessité de prendre en charge cette population fragile et ce, dans «un cadre éducatif spécial». Il plaide pour la mise en place de réseaux de protection de ces victimes, protection sur le plan juridique des enfants nés hors mariage. Il y a des situations qui trouvent difficilement des solutions, notamment en l'absence de parents déclarés. Très souvent la présence de la mère permet de donner un nom à l'enfant né hors mariage. Il a cité l'exemple de Fatiha – une jeune fille de 16 ans enlevée par un groupe terroriste en 1996 à Ouled-Slama (Blida) – qui a vécu pendant deux mois au maquis après avoir été violée par 40 terroristes. Il existe des centaines de milliers de cas semblables à celui de Fatiha . Accablées, ces femmes victimes de viols, souffrent aujourd'hui seules et en silence, tout en gardant l'espoir de voir, un jour, le sourire se dessiner sur le visage de leurs enfants.