Sidi-Ammar avait deux fils, Shaykh ben Ammar, l'aîné, et Sidi-M'hammad, le cadet. Ils sont encore jeunes quand leur père les envoie au ksar de Tasfawt auprès du grand walî, Sidi- Musa Û-Lmes‘ûd, saint patron de Timimoune. Sidi-Musa a l'habitude, pour avoir de l'eau fraîche, de suspendre son outre à une étoile, la nuit, et de la récupérer au matin. Prodige qui fait partie de son pouvoir de saint ! Mais voilà qu'un matin, en récupérant son outre, Sidi- Musa remarque que quelqu'un s'en est servi et il s'interroge : quel est celui, parmi ses élèves, qui est parvenu jusqu'à l'étoile et a décroché l'outre ? Il ne pose pas la question à ses élèves, mais il se promet de découvrir le coupable. Un jour, le saint fait son cours puis s'arrête pour faire une pause. Or, habituellement, le saint profite de cette pause pour donner à ses élèves leur pitance : des dattes qu'il prélève de ses magasins. C'est lui qui en a les clefs et c'est lui qui en fait la distribution. Ce jour-là, alors que les étudiants attendent les dattes, le saint leur dit : «J'ai perdu les clés du magasin ! Suivez mes traces et retrouvez-les !» Tous les élèves partent à la recherche des clefs. Sidi ben Ammar veut faire comme ses camarades. «Ne bouge pas, lui dit Sidi-M'hammad. Il a les clefs !» Sidi-Musa, qui l'a entendu, comprend alors que c'est lui qui a bu de son outre ! Il ne dit rien à son jeune élève, mais désormais, il fait plus attention à lui.