Résumé de la 4e partie n Maurice Maeterlinck, le fameux poète belge, entend parler des «chevaux calculateurs» et pense qu'il y a un rapport entre les chevaux et les abeilles… Parmi l'assemblée de mathématiciens qui voudront bien assister aux exercices et aux contrôles, je propose que chacun de ces messieurs inscrive un chiffre dont il désire la racine carrée ou la racine cubique et on présentera l'ardoise à Mohamed sans que j'y jette un regard. Ainsi, tout risque de transmission de pensée entre le cheval et la personne qui lui présente l'ardoise sera éliminé. Tout le monde soupire un grand coup car tout le monde y perd son latin. Eh bien ! va pour l'interrogation sans que Herr Bohn lui-même connaisse le problème posé. Mais déjà on se dit que Mohamed, Hans et Zarif vont, toujours aussi imperturbables, donner les mêmes désespérantes bonnes réponses à coups de sabot droit et de sabot gauche. Maintenant, au-delà du mystère de l'intelligence animale ou même du génie calculateur, les savants allemands et ceux des autres pays en arrivent à toucher l'insondable. On n'est plus très loin de la preuve de l'existence de Dieu ! Alors que les esprits forts, de plus en plus nombreux et agressifs, rejettent toute référence à une intelligence supérieure et qui de plus est divine. Si la science et le rationalisme gagnent du terrain, un autre courant de pensée s'infiltre de plus en plus dans les différentes couches sociales de la bourgeoisie européenne et américaine. Le spiritisme devient une sorte de nouvelle religion. Les guéridons et les ectoplasmes animent de plus en plus de soirées impressionnantes. On découvre des voyants, plus ou moins efficaces, parfois terriblement précis, jeunes ou vieux, hommes, femmes ou pucelles. — Et si ces chevaux étaient des «voyants» ? — Que voulez-vous dire par là ? — Et si ces chevaux, dans leur forme animale, étaient des médiums ? Et s'ils n'étaient que la forme physique que prendraient des entités de l'au-delà pour communiquer avec les êtres humains ? — Vous me donnez le frisson. Mais si cela était, ça ne résoudrait pas tous les aspects du problème... — Lesquels ? — Eh bien, il faudrait que ces entités soient elles-mêmes des calculateurs prodiges. — Qu'ils l'aient été dans leur vie humaine, quelle importance ? Dans le monde de l'au-delà, je pense que tous les êtres en errance, que toutes les âmes disparues doivent être en mesure de répondre à quelques questions concernant des racines cubiques ou carrées. Dans l'autre monde on doit savoir tout faire... Un nouvel épisode vient corser encore le problème : M. Krall achète un nouveau cheval, Berto, un étalon qui ne répond pas aux questions en lisant sur une ardoise. Pour une bonne et simple raison : Berto est un étalon aveugle. Il met un certain temps pour se mettre au diapason de ses collègues, mais bientôt il résout les racines cubiques et carrées avec brio. Et il répond lui aussi à coups secs de sabot du pied droit et du pied gauche. Les chevaux parviennent à présent à lire l'heure. Les sceptiques, bien que sceptiques, se disent : «Nous donnons notre langue au cheval.» Il n'y a jamais eu d'explication scientifique aux «chevaux calculateurs d'Elberfeld».