Ainsi donc, Ibn Ma'ra' prolonge son séjour à Tlemcen pour suivre les leçons de Choudhi. Après avoir donné son cours, l'homme prend son plateau et vend ses bonbons aux enfants. Il crie, il chante, il fait le pitre et les enfants qu'il a régalés de bonbons le frappent avec des pierres. Il tente de les éviter mais quelques-unes l'atteignent et le blessent. Il continue quand même à chanter et à proposer ses bonbons. «Qui veut acheter mes bonbons, ils ne coûtent presque rien et ils sont délicieux. Demandez mes bonbons, vous ne le regretterez pas !» Les pierres continuent à pleuvoir. Ibn Ma'ra' est scandalisé. «Arrêtez ! hurle-t-il, ils vous donne des bonbons et pour le remercier, vous le frappez !» Choudhi, le front ensanglanté sourit et dit : «Laisse-les ! Je n'ai que ce que je mérite !» Ibn Ma'ra' lui montre son front : «Regarde, ils t'ont blessé ! Du sang coule de ton front !» Choudhi, d'un revers de la main, s'essuie et il regarde son disciple. «Et moi, je ne les ai pas agacés par mes pitreries ? Ils jouaient tranquillement, et je les ai perturbés !» C'est ainsi que ce sont les malamatis : ils jouent aux fous, ils s'attirent l'hostilité des foules qui croient réellement qu'ils sont fous mais quand ils sont seuls, ils s'abîment dans la prière et la contemplation ou alors, comme Choudhi, ils enseignent la connaissance ineffable !