Se substituant aux médecins, de plus en plus de personnes décident du traitement à s'administrer et même de celui à conseiller à autrui. Acheter des médicaments sans ordonnance est, en effet, devenu chose courante. Une pratique qui n'est cependant pas sans danger. Acheter un médicament sans avis médical est devenu, au fil des années, un comportement partagé par une grande partie des Algériens. A la simple douleur, on se dirige vers la pharmacie pour se procurer un traitement qu'on croit adéquat. Une étape importante, celle de consulter un médecin, est ainsi non respectée, sans même s'interroger sur les retombées néfastes de cette attitude. Les études concernant ce phénomène sont rares. La toute récente remonte à l'année 2006 et a été réalisée par le docteur Ziari, spécialiste en pharmacologie. Cette enquête a montré que «trois Algériens sur quatre auraient recours à une médication sans avis médical et plus de 1 500 spécialités sont délivrées en pharmacie sans ordonnance». Cette pratique de libre achat concerne, selon la même étude, 65% des médicaments vendus en ville. «Pas moins de 650 millions de boîtes sont vendues de cette manière annuellement. La proportion de personnes qui se soignent seules augmente progressivement chez les adultes de 40 à 79 ans, puis diminue à partir de 80 ans», a encore noté l'auteur de l'enquête. Le comble est que le recours à l'automédication est, précise l'étude, plus important chez les cadres. La plupart des personnes interrogées ont justifié leur attitude par l'adoption d'un «comportement préventif». Si certains médicaments sont autorisés à être vendus sans ordonnances (antalgiques, certaines crèmes dermatologiques et cosmétiques...), d'autres, en revanche, sont formellement interdits à la vente sans la prescription d'un médecin. Les effets secondaires des médicaments pourraient causer la mort des personnes fragiles. Par exemple, les corticoïdes et les antibiotiques causent un grave déficit immunitaire, d'où la nécessité de l'interdiction de leur vente sans avis médical. Même les produits cosmétiques constituent, dans certains cas, un véritable danger. La majeure partie de ceux qui ont recours à l'automédication, ne prend même pas la peine de consulter la notice pour être en mesure de vérifier, avant chaque usage, la posologie et l'existence d'éventuelles contre-indications ou d'associations dangereuses, ainsi que les dates de péremption. «Un pharmacien ne peut, bien évidemment, pas savoir si la personne qui demande un traitement est atteinte d'autres affections. Il se contente de vendre, sans se soucier des conséquences de son geste sur la santé du client. Les officines sont, malheureusement, devenues comme des échoppes. Il faut imposer une loi interdisant ce business. Si les citoyens en sont inconscients, l'Etat est, pour moi, le principal responsable de cette anarchie», regrette le propriétaire d'une pharmacie à la rue Didouche-Mourad, lui-même spécialiste en pharmacologie. Les enfants peuvent aussi être victimes du mauvais comportement des parents. Certains parents tiennent à disposer d'une «boîte à pharmacie» à la maison, des médicaments acquis sans avis médical et soigner les enfants en cas de malaise léger.