Motifs n Les causes de ce comportement sont diverses, mais ses répercussions néfastes restent les mêmes. «C'est vraiment un avantage de pouvoir se procurer un médicament sans passer par le médecin. En cas de mal de tête : doliprane ou Aspirine, en cas de douleur abdominale : phosphalugel... Je suis certain que le médecin me prescrirait ces médicaments, alors pourquoi perdre du temps et de l'argent ?», estime une dame d'un certain âge croisée dans une pharmacie à la rue Didouche-Mourad. Pour elle, il n'est plus question de consulter un médecin sauf en cas de problème majeur. «Parfois, les médecins compliquent les choses. Pour une simple fièvre, par exemple, ils demandent des analyses de sang et prescrivent toute une liste de médicaments. Alors, il vaut mieux éviter tout cela, tant qu'on peut acheter les médicaments que nous avons déjà expérimentés dans de pareilles circonstances», indique une autre jeune femme. Nos interlocutrices affirment connaître tous les médicaments nécessaires pour calmer les maux de tête, de l'estomac, des dents et de dos par… expérience. Le facteur temps joue aussi un grand rôle dans cette attitude. Les citoyens n'ont plus le temps d'aller faire la queue dans des structures sanitaires publiques pour, disent-ils, de simples malaises. «Pour une consultation dans un hôpital, il faut consacrer toute une journée. Des obligations professionnelles et familiales ne manquent pas et il est plus simple d'acquérir un médicament sans ordonnance que d'avoir des soucis au travail…», affirme Mokrane, la quarantaine, qui se considère lui-même «médecin des petites maladies» et conseillent des médicaments à ses proches et amis ! En outre, les coûts des consultations dans les cabinets médicaux privés sont dissuasifs pour une bonne partie de citoyens. Pour une simple visite de quelques minutes, il faut payer entre 400 et 600 DA. L'équivalent d'une journée de travail ! En outre, d'autres citoyens affirment avoir une phobie de médecins, craignant découvrir qu'ils sont atteints d'autres maladies plus graves. C'est une catégorie de gens qui ne veulent pas savoir qu'ils sont touchés par des affections nécessitant un long traitement. «Franchement, les médecins me font peur. Une fois, je suis allé voir un médecin pour des douleurs au dos et il a commencé à me raconter des histoires : que j'étais, peut-être, atteint de rhumatisme… Je suis sorti et j'ai acheté des antibiotiques et certaines plantes médicinales. Je me suis soulagé sans me casser la tête», témoigne Karim, la trentaine. Si les raisons de ce phénomène sont diverses, ses répercussions sont presque les mêmes : addiction, atteinte d'autres maladies, découverte tardive d'une maladie et par conséquent réduction des chances de guérison.