Des historiens et des créateurs français ont estimé que la campagne menée actuellement par des «milieux nostalgiques» de la colonisation contre le film Hors-la-loi de Rachid Bouchareb, qui représentera l'Algérie au prochain Festival international du cinéma de Cannes, vise à «faire obstacle à la liberté de la création et à la nécessaire reconnaissance du passé colonial de la France». Dans un texte intitulé Le film Hors-la-loi de Rachid Bouchareb : les guerres de mémoires sont de retour, ces historiens (Pascal Blanchard, Gilles Manceron, Jean-Pierre Peyroulou, Benjamin Stora, Mohamed Harbi, la réalisatrice Yasmina Adi…) ont estimé que ces réactions sont «un symptôme du retour en force de la bonne conscience coloniale dans certains secteurs de la société française». Les auteurs du texte ont rappelé que les premières pressions ont débuté dès l'automne 2009 après que le député UMP des Alpes-Maritimes, «fâché de la manière dont le scénario évoquait les massacres de Sétif et l'aide apportée par des Français aux militants indépendantistes algériens», eut discrètement saisi le secrétaire d'Etat à la Défense et aux Anciens combattants, puis le maire de Toulon, pour «dénoncer le concours financier apporté par le Centre national du cinéma (CNC) à ce film qu'il n'avait toujours pas vu». Les auteurs du texte ont révélé, par ailleurs, que «des pressions ont été exercées sur les chaînes de France Télévisions pour ne pas coproduire le film et sur les responsables de la sélection officielle du Festival de Cannes pour qu'il ne soit pas sélectionné» et que «le producteur a été l'objet de demandes inhabituelles venant de la présidence de la République et du secrétariat d'Etat à la Défense et aux Anciens combattants pour visionner (dans quel but ?) le film avant la date de sa présentation officielle aux jurés et au public du Festival de Cannes». R. C. / APS