Les chefs de notre commando, malgré toute leur expérience martiale, n'avaient plus le loisir, dès lors que l'ennemi avait pu nous repérer, de changer de tactique ou de bouleverser la stratégie qu'ils avaient préalablement adoptée pour l'embuscade. C'était trop tard pour nous permettre d'accrocher la soldatesque française, une fois nos plans entravés par un impondérable. En tant que guérilleros, nos principaux atouts étaient la légèreté logistique, l'effet de surprise, l'action éclair et le repli rapide. Ce dernier point était sans doute le plus vital et le plus important, car, nos moyens en armes et en effectifs étaient extrêmement limités par rapport aux forces de l'ennemi. Avant d'engager le combat, les chefs de l'ALN tenaient toujours à assurer les meilleures conditions de repli aux djounoud, ce qui leur permettait d'éviter trop de pertes dans leurs rangs. Ainsi, quand nous n'avions pas la certitude d'avoir au moins quatre-vingts pour cent de chances de notre côté pour vaincre, nous n'attaquions pas. La vie d'un moudjahid était très chère et trop précieuse à nos yeux pour être gaspillée par bravade et sans raison valable. En dernière analyse, on verra au sujet de l'embuscade ratée, que celle-ci fut loin de constituer pour nous un échec total, car même si notre bilan n'était pas aussi brillant que prévu, notre mission était en partie réussie, puisque nous avions tué le commandant, trois autres de ses acolytes officiers ainsi que le chauffeur et détruit leur véhicule. Pour notre part, nous n'avions eu à déplorer aucune perte humaine, et ce, grâce à Dieu Le Tout-Puissant et à la sage expérience de nos chefs. Par la suite, en compagnie de nos deux chefs, Si Zoubir et Si Moussa, notre commando allait réussir un grand nombre d'opérations militaires (embuscades et accrochages), parmi lesquelles les batailles suivantes, dont nous ferons le récit dans cet ouvrage : Tamesguida, 22 mars 1957, face aux parachutistes des Commandos Noirs du colonel Bigeard, (Sidi Mohand Aklouche le 26 avril 1957), Zaccar (Miliana), contre le 29e bataillon du commandant Gaudain le 4 Mai 1957, Sidi Semiane (Cherchell), le 20 Mai 1957. Accrochage à Tadinarte Krèreche Médéa 12 mars 1957 Nous, membres du Commando Si Zoubir, étions dans la région III de Cherchell à proximité du village de Duplex (actuellement Damous). Nous étions avec la section du chahid Si Abdelhak Noufi, attendant de participer à une embuscade qui devait être tendue à un convoi militaire français très important, lorsqu'un agent de liaison vint remettre une lettre du commandement de la wilaya IV à Si Zoubir, lui ordonnant de se rendre de toute urgence dans la région de Blida avec son commando. Si Zoubir a passé les consignes à Si Moussa Kellouaz en lui disant : «Je pars seul, pour pouvoir marcher vite jour et nuit ; vous, avec le commando, vous me suivrez, rendez-vous à Blida, Inchâ'Allah.» Nous sommes arrivés vers deux heures du matin au douar Tiberguent. Chaque groupe a aussitôt rejoint le refuge qui lui était désigné. Il y avait dans ce douar un groupe de fidaïyine du Sahel et de la Mitidja. (à suivre...)