Débat n L'intérêt de cette rencontre est de prêter la voix à des femmes écrivaines, pour que celles-ci puissent parler, se fassent entendre et, du coup, se fassent comprendre et ce, à travers la littérature. Quinze écrivaines dont huit algériennes se retrouvent, depuis hier et ce, le temps d'une rencontre de deux jours, à l'Institut national supérieur de musique. Ces écrivaines dont les Algériennes Maïssa Bey, Fatima Bekhaï et Ouarda Ensighaoui-Himeur, l'Autrichienne Anna Kim, la Tchèque Tereza Bouckova, la Belge Françoise Lalande et bien d'autres encore, se retrouvent pour échanger leurs expériences, partager leur pensée et leurs sensibilités .L'échange se fait à travers trois axes : le récit de vie comme expression de la réalité, la fiction comme expression de rêve et de changement et la poésie comme espace de liberté. C'est aussi dire, voire raconter leur vie. Placée sous le thème «Récit, fiction et poésie comme contribution des femmes à la pensée», cette rencontre est initiée dans le cadre de la coopération entre le ministère de la Culture algérien et la Délégation de l'Union européenne à Alger et avec le concours de l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (Aarc). Ouarda Ensighaoui-Himeur, universitaire et auteur, a, dans sa communication, abordé trois romans : Histoire de ma vie de Fadhma Aït Mansour Amrouche, L'Amour, la fantasia d'Assia Djebbar et Mes Hommes de Malika Mokaddem. Par là, l'intervenante nous montre que «ces femmes ont créé une double rupture dans la vision exotique de l'Algérie et des Algériennes», précisant que tout en arrachant la femme de sa situation d'objet, «ces écrivaines ont pu la placer dans une situation de sujet parlant qui s'affirme avec l'utilisation du Je. De femme-objet on est passé à un sujet producteur de discours, assumant le lourd fardeau de la transgression». Ces femmes-écrivaines se sont affranchies du regard de l'autre, notamment de l'homme et de celui de la société pour se dire, dire leur nom, leur corps, pour s'émanciper et ce, dans une langue qui n'est pas celle de leurs ancêtres. Fatima Bekhaï, universitaire, a, quant à elle, donné sa vision de l'évolution de la femme à travers Revivre en écriture, affirmant : «Contrairement à ce qu'on pensait, les femmes n'étaient pas analphabètes. Car après l'Indépendance, elles ont pris le train en marche. On les trouvait dans l'éducation, puis elles ont investi tous les secteurs. Dans les années 1980, on les trouve dans le commerce et l'industrie. Plus tard, elles investiront la littérature pour dévoiler ce qui, autrefois, était chuchoté.» Dans sa communication lue par une représentante, l'Autrichienne Anna Kim a mis l'accent sur «la difficulté d'écrire le présent et de trouver un langage approprié pour en rendre compte». Elle a également souligné «la complexité du réel et la contrainte de devoir faire confiance aux mots dans des situations de violence extrême», tout en appuyant le fait que dans son œuvre, «il est avant tout question du traitement de problèmes humains». C'est ainsi que la littérature s'avère l'un des moyens pour véhiculer et dire la parole des femmes.