Evocation n Il n'est plus des nôtres mais il vit dans chaque note de musique chaâbie. Le Cardinal nous a quittés le 23 novembre 1978 et trente-deux ans plus tard son empreinte est toujours aussi fraîche et claire sur le patrimoine musical algérien. Encore plus étonnant après tant d'années, la popularité d'El-Anka est restée intacte et donne même l'impression de s'accroître. Pour preuve, l'Etablissement arts et culture a organisé vendredi une soirée en hommage au maître incontestable de la chanson chaâbie. Un riche programme était proposé au Sierra Maestra à la rue Ferhat Boussad (ex-Meissonier) en plein centre d'Alger. Et ce soir-là, la surprise a été de voir le public algérois répondre en masse à l'appel du mandole. La salle, récemment rénovée, était pleine à craquer. Une ambiance familiale très algéroise régnait dans le public, tous âges confondus. La soirée a débuté avec l'entrée de la troupe Zorna algéroise qui traverse la salle avant de monter sur scène jouer quelques morceaux de cette musique citadine symbole de toutes les fêtes de la ville d'Alger. Chaque année l'hommage au regretté M'hammed El-Anka se fait en musique et dans un répertoire purement chaâbi. Cette année marque l'ouverture de la programmation musicale à tous ceux qui sont sensibles à l'œuvre du maître. C'est dans ce sens que le groupe gnawi Ouled Haoussa, lauréat du premier prix du Festival national de musique gnawie, prenait part à cette soirée. Le groupe débute par un morceau du diwan puis présente une version gnawie de la célèbre chanson d'El-Hadj El-Anka ‘Lehmam'. La deuxième partie de la soirée fut, quant à elle, purement chaâbie. L'orchestre se met en place et le chef d'orchestre et illustre fils de son père El-Hadi El-Anka entre sur scène et se met au piano. M'hammed El-Anka a laissé, après toute une vie vouée à la musique, une œuvre inquantifiable, un patrimoine à lui seul, mais pas que ça. Il a aussi laissé un fils qui est aujourd'hui un virtuose du piano, et qui dirige un orchestre aussi habilement que son père. Pour la première fois aussi cette année une voix féminine s'invite à cet hommage annuel. La chanteuse Nardjess est la première à chanter les qcid du défunt maître au nom de toutes les femmes qui ont, elles aussi, à un moment, fredonné un air du Cardinal. Un autre grand admirateur du maître est de la fête. Hasnaoui Amechtouh, qui compte beaucoup d'admirateurs dans la salle, fait son entrée en couvrant de louanges ses deux maîtres El-Anka et Cheikh El-Hasnaoui. D'humeur très joyeuse et communicative, le bref temps de scène accordé à Hasnaoui Amechtouh est un pur moment de plaisir. Et pour clôturer cet hommage au Cardinal, quoi de mieux qu'un autre maître plein d'humilité. Abdelkader Chaou, l'un des chanteurs chaâbis les plus appréciés enchante l'assistance de deux qcid avec sa voix apaisante et son élocution il fait le bonheur du public. Une belle soirée en hommage à un homme d'exception, dont la personne suscite autant d'admiration que son œuvre musicale. Une soirée aussi très appréciée par le public d'Alger en manque de sa propre musique citadine.