Crise n Les pays d'Afrique de l'Ouest ont menacé, hier, de déloger par la force Laurent Gbagbo, qui se maintient à la présidence de la Côte d'Ivoire malgré les appels incessants de la communauté internationale. Brisant un silence de plusieurs semaines, depuis le grand hôtel d'Abidjan où il est retranché avec son gouvernement, Ouattara a presque au même moment exhorté l'armée à se placer sous ses ordres pour mettre fin aux «atrocités» commises contre la population. Au terme d'un sommet de ses chefs d'Etat à Abuja (Nigeria), la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a exigé, une nouvelle fois, le retrait de Gbagbo et annoncé l'envoi prochain d'émissaires dans le pays. «En cas de rejet de cette demande non négociable, la Communauté n'aura d'autre choix que de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l'usage de la force légitime, pour réaliser les aspirations du peuple ivoirien», a prévenu l'organisation. C'est la première fois depuis le début de la crise née de la présidentielle du 28 novembre que Gbagbo, qui a ignoré jusque-là ultimatums et sanctions, est directement sous la menace d'une opération militaire destinée à renverser son régime. Devant le niveau excessivement élevé de pertes en vies humaines depuis début décembre, la Cédéao a averti les responsables de ces actes qu'ils feront l'objet de poursuites devant les tribunaux internationaux pour ces violations des droit humains, dans les délais les plus rapides. Le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a adopté jeudi une résolution dénonçant les «atrocités» commises après le scrutin, qui ont fait, selon l'ONU, 173 morts du 16 au 21 décembre. Depuis son hôtel soumis depuis plus d'une semaine à un blocus par les forces pro-Gbagbo, Ouattara, entouré de son gouvernement, a, devant une dizaine de journalistes, appelé l'armée, restée fidèle à son adversaire, à lui obéir et à protéger la population. «De graves violations des droits de l'Homme sont constatées partout», a-t-il alerté lors d'un discours solennel pour Noël, sa première intervention publique depuis début décembre. «En tant que chef suprême des armées, je demande aux Forces de défense et de sécurité (FDS, loyales à son rival) d'assurer leur mission républicaine de protection des populations contre les miliciens et mercenaires étrangers qui font couler le sang des Ivoiriens», a lancé Ouattara, drapeau ivoirien à son côté. Il a promis que la justice sera saisie «pour faire la lumière sur ces actes odieux» et qu'une «commission d'enquête nationale» sera constituée, tout en souhaitant la venue d'une mission de la Cour pénale internationale (CPI) «dans les tout prochains jours». Par la suite, le gouvernement Gbagbo a jugé «illégale» une décision de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (Uémoa) d'accorder à Ouattara le contrôle des comptes ivoiriens à la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO). Le camp Ouattara avait engrangé mercredi un premier succès avec la reconnaissance par l'ONU de Youssouf Bamba, l'ambassadeur qu'il avait désigné auprès de l'organisation. Mais la communauté internationale s'impatiente.