Résumé de la 64e partie n Au procès de Jeanne Weber, les juges sont persuadés de sa culpabilité, mais les rapports d'autopsie innocentent l'accusée. Les experts ne tiennent compte ni des conclusions de la police ni des témoignages des parents et des voisins et encore moins des déclarations du docteur Saillant et de ses collègues, médecins généralistes et de surcroît médecins de quartiers pauvres. «Les cadavres autopsiés ne révèlent ni marques de strangulation ni séquelles d'étouffement !» Et le docteur Thoinot de conclure : — on ne peut pas accuser cette femme du meurtre de ces enfants : ils sont décédés de mort naturelle, à la suite d'infections diverses ! La foule, elle, massée de bon matin devant le tribunal, scande des slogans hostiles à Jeanne Weber : — c'est une criminelle ! — elle mérite la mort ! la presse annonce le procès dans ses manchettes et certains journaux appellent Jeanne Weber «l'ogresse de la Goutte d'Or» et «l'ogresse de Paris», et beaucoup, anticipant sur l'issue du procès, la condamnent. «Cette femme, qui tue de sang-froid des enfants innocents, ne mérite pas de vivre !» Mais les juges ne se laissent pas impressionner par ce mouvement. en effet, cette foule qui condamne à l'avance Jeanne Weber et réclame sa tête va la porter aux nues si la défense réussit à prouver son innocence. Et c'est ce qui se passera : l'avocat de Jeanne, Henri Robert, qui s'est déjà illustré dans des affaires sensationnelles, crie à l'innocence de sa cliente : «C'est une femme éprouvée par la vie et qui se consacre aux enfants, comment peut-on l'accuser de ces crimes horribles ?» Et il tourne au ridicule les déclarations des médecins de quartier et les témoignages des proches des victimes, tous, selon lui, animés par la haine ou l'incompétence, puis il appelle à la barre Thoinot qui va rejeter la thèse de la strangulation et tourner, lui aussi, au ridicule, ses tenants. Il ne laissera aucune place au doute ! «Cette femme est innocente !» Le verdict est prononcé le 30 janvier, dans l'après-midi. Jeanne Weber, reconnue innocente des charges qui pesaient contre elle, est acquittée. — Vous êtes libre, lui dit, à contrecœur, le juge. Comme prévu, la foule change d'attitude : celle que l'on appelait, il y a quelques jours encore «l'ogresse de la Goutte d'Or», est applaudie et fêtée. Jeanne, imperturbable, se contentera de déclarer : — Je suis innocente. La presse, auparavant acharnée, salue cette victoire de la science sur les pratiques policières. «Sans la médecine légale, lit-on dans la plupart des journaux, une innocente aurait été condamnée !» C'était pour Thoinot le triomphe. Mais en réalité l'affaire Jeanne Weber est loin d'être classée puisque «l'innocente» va encore faire parler d'elle ! (à suivre...)