Résumé de la 118e partie n Victoria jubile en voyant combien ce personnage de Lefarge, qu'elle a entièrement inventé, intrigue Edward... Ils étaient maintenant dans les faubourgs de Bagdad. La voiture s'engagea dans une petite avenue, bordée de villas de style prétendument européen, pour finalement s'arrêter devant l'une d'elles. Edward se rangea derrière une voiture de tourisme en station au bord du trottoir, descendit, puis gravit le perron avec Victoria. La porte leur fut ouverte par une petite femme au teint jaune, avec qui Edward échangea quelques mots en français. Victoria, encore qu'elle n'eût de cette langue qu'une connaissance limitée, comprit qu'il s'agissait d'elle et qu'il était question de lui faire sur-le-champ revêtir un déguisement. De fait, dans la minute qui suivit, on la conduisait dans une chambre à coucher où, en quelques instants, elle devait être transformée... en religieuse. Elle passa la robe, coiffa la cornette et ce fut les mains croisées sur son rosaire aux perles de bois que, peu après, elle se retrouva devant Edward. Il sourit. — Vous êtes la plus jolie nonne que j'aie jamais rencontrée ! Gardez les paupières baissées, surtout devant les hommes, et vous serez parfaite ! La Française qui avait aidé Victoria à revêtir l'habit religieux, vint les rejoindre, déguisée elle aussi, et ce furent deux nonnes qui sortirent de la maison pour monter dans la voiture. Un chauffeur européen, en blouse blanche, était au volant. — Maintenant, Victoria, dit Edward, tout dépend de vous ! Faites exactement ce qu'on vous dira de faire ! Il y avait dans le ton comme une menace. Elle dit : — Vous ne venez pas avec nous ? — Impossible ! Mais vous ne serez pas longtemps sans me revoir... Son visage tout près de celui de Victoria, il ajouta, la voix caressante : — Je compte sur vous, mon amour ! Ce rôle, il n'y a que vous qui puissiez le jouer... et je vous adore ! Je ne peux pas embrasser une bonne sœur, mais... le cœur y est ! Elle baissa les yeux comme l'eût fait une vraie religieuse. Elle lui aurait craché à la figure avec plaisir. Il poursuivit : — Pour le reste, ne vous en faites pas ! Vos papiers sont en règle et vous n'aurez aucune difficulté à la frontière syrienne. J'oubliais ! En religion, vous êtes la sœur Marie des Anges. Sœur Thérèse, qui vous accompagne, s'occupe de tout et c'est à elle que vous obéissez. Il ferma la portière, recula d'un pas sur le trottoir et dit encore : — Surtout, je vous en supplie, filez droit !... Sinon... Il n'acheva pas sa phrase et la voiture démarra tandis qu'il agitait gentiment la main en signe d'adieu. Victoria réfléchissait. Aussi bien dans la traversée de Bagdad qu'au poste frontière, elle pourrait crier, appeler au secours, soulever, d'une façon ou d'une autre, quelque scandale qui attirerait l'attention. Mais qu'en sortirait-il ? (à suivre...)