Le vent de la colère semble se propager dans le monde arabe. Ce jeudi, c'était au tour du Yémen d'exprimer son ras-le-bol et son rejet du chef de l'Etat au pouvoir depuis trois décennies. Des milliers de personnes ont manifesté ce jeudi à Sanaâ à l'appel de l'opposition, réclamant le départ du Président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis 32 ans. Le Président tunisien «est parti après 20 ans, 30 ans au Yémen, ça suffit», scandaient les manifestants en référence au mouvement de contestation populaire sans précédent en Tunisie qui a chassé le président Zine El-Abidine Ben Ali après 23 ans au pouvoir. «Non au renouvellement du mandat, non à la transmission héréditaire du pouvoir», «l'heure du changement a sonné», répétaient les manifestants yéménites qui s'étaient rassemblés à l'appel de la «Rencontre commune», une coalition de l'opposition. Celle-ci a organisé quatre manifestations distinctes dans la capitale yéménite pour «disperser les forces de police», selon l'un des organisateurs. La police n'est pas intervenue contre les manifestants. Mais le Congrès populaire général (CPG, parti au pouvoir), a organisé quatre meetings qui ont rassemblé des milliers de personnes dans la capitale pour faire contrepoids aux manifestations de l'opposition. Au pouvoir depuis 1978, M. Saleh a été élu pour la première fois en 1999 au suffrage universel direct pour un mandat de sept ans. Il a été réélu pour la deuxième fois en 2006 pour un mandat qui arrive à expiration en 2013. Un projet d'amendement de la Constitution, en discussion au Parlement malgré le refus de l'opposition, pourrait ouvrir la voie à une présidence à vie pour l'actuel chef de l'Etat. L'opposition accuse, en outre, le président Saleh, 68 ans, de vouloir transmettre la présidence à son fils aîné Ahmad, chef de la garde républicaine, unité d'élite de l'armée. Mais le chef de l'Etat s'est défendu dans un discours télévisé dimanche soir de vouloir transmettre le pouvoir à son fils. «Nous sommes une république, et je suis contre la transmission du pouvoir», a-t-il dit. Le Yémen est un des pays arabes les plus pauvres et l'unique république de la péninsule arabique. Les manifestations de ce jeudi s'inscrivent dans le cadre d'un programme de protestations de l'opposition, à l'approche des élections législatives prévues le 27 avril. Le CPG et les partis de l'opposition avaient décidé d'engager le dialogue pour faire évoluer le Yémen vers un régime parlementaire avant ces élections, mais ce dialogue a marqué le pas. La «Révolution du Jasmin» en Tunisie ayant provoqué une onde de choc dans plusieurs pays arabes, notamment en Egypte, théâtre cette semaine de manifestations sans précédent contre le président Hosni Moubarak, a donc vite «contaminé» le Yémen.